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Lectures
24 février 2017

Les roses blanches

9782752910677

 

« Les roses blanches »

JOUANARD Gil

(Phébus)

 

« Juliette fut sans nul doute l’un des épouses les plus invivables et l’une des mères les moins supportables qui aient existé, quoiqu’elle disposât d’indéniables qualités de fonds. » Voilà à quoi s’attelle le roman (vrai) de Gil Jouanard : brosser le portrait de sa mère. Juliette. A travers la multitude des souvenirs. Par touches successives. Dans le respect de la chronologie. De sa naissance dans le Gévaudan jusqu’à sa mort en Avignon. L’extrême misère à la fois matérielle et culturelle qui prévalait au sein de sa famille. Les tentatives désespérées pour échapper à une destinée de repli et d’enfermement. Les farouches combats pour donner corps aux rêves les plus insensés. Dont ce court séjour aux USA au lendemain de la seconde guerre mondiale, séjour dont Juliette garda des souvenirs éblouis. Son étonnante capacité d’adaptation, grâce à laquelle elle fut en mesure de vivre et de travailler en Allemagne, toujours au lendemain de la même guerre. Révoltée. Versant bolchevique. Elle qui, catholique d’origine, avait épousé en premières noces, un protestant d’origine, bolchevique et militant, donc résistant lorsque cela devint nécessaire. Mère de l’Auteur puis d’une fille qui devint hôtesse de l’air. Morte d’Alzheimer. « Juliette est d’un monde qu’elle aura passé sa vie à récuser, à barbouiller de suie, à raturer, à condamner aux oubliettes ; un monde qui, pour se venger, ne lui aura pas laissé une minute de répit. »

Le Lecteur résume à grands traits cette œuvre à laquelle il fut très sensible. Une sensibilité due au fait que voilà une trentaine d’années de cela, il frôla Gil Jouanard et conversa en deux ou trois occasions avec un écrivain qu’il avait arbitrairement rangé dans la seule catégorie des Poètes ? Peut-être. Mais ces « Roses blanches », celles de la chanson que Juliette entonna tant de fois, méritent beaucoup mieux que la simple mention due à une vague et lointaine « connaissance ».  Elles offrent un très beau moment d’humanité via cette approche évidemment littéraire. Une « belle » vie, marquée du sceau des souffrances, des combats, du refus de la résignation, des contradictions (assumées ou non). Un roman « vrai » sans la moindre trace de pathos, un roman de la mémoire nécessaire à qui veut cheminer en disposant de quelques repères utiles.

« Soyons donc, hélas a posteriori, plus lucides qu’ils ne le furent, et ne tergiversons pas plus qu’il n’est raisonnable, quelle que soit la dureté du diagnostic postopératoire qu’il convient de dresser : Paul (le premier marie de Juliette, le parpaillot) était un bel homme, débonnaire quoique sanguin, à la fois hardi dans son attitude publique et, malheureusement, d’une grande faiblesse pour tout ce qui touchait à la sphère privée, ce qui ne fut pas sans effets déplorables. Juliette, pour sa part, sans être affectée d’une laideur rédhibitoire, était plutôt mal bâtie et proposait au monde et à l’univers entier un tempérament, une nature et un caractère aussi rébarbatifs que décourageants. Pour ce qui est du physique, elle disposait certes de seins monumentaux, dotés de surcroît d’une fermeté de granit margeridois ou de basalte aubracois, et de fesses rebondies à souhait ; mais sa silhouette était de ce type court sur pattes et râblé que le Massif central, fidèle à son passé aurignacien et chanceladéen, produisait à coup de généreuses et prolifiques giclées spermatiques en ce temps-là. »

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