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Lectures
17 janvier 2013

Crâne chaud

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« Crâne chaud »

QUINTANE Nathalie

(P.O.L.)

 

Nathalie Quintane poursuit son « bonne femme » de chemin. Avec toujours cette belle impertinence qui en d’autres circonstances réjouirent le Lecteur. Ce qui est assez rare dans l’univers si souvent aseptisé du roman franchouillard. Dans ce roman, pour traiter du « sentiment sexuel », l’écrivaine s’est trouvée une accompagnatrice de choix : Brigitte Lahaie. Le Lecteur ne vous fera pas l’affront d’esquisser une notice biographique de l’actrice qui dispense désormais ses conseils sur une radio généraliste à des auditeurs le plus souvient inquiets sur les manifestations saugrenues de leur sexualité. Donc Brigitte Lahaie, guide et non référence pour Nathalie Quintane qui prend un malin plaisir à bousculer ses lecteurs, à les renvoyer de Gertrude Stein à Elio Pietri, à les contraindre à traverser des contrées mille fois défrichées et pourtant toujours méconnues. Le jeu est subtil, hilarant parfois. Le Lecteur, rendu à sa singularité, s’est laissé prendre au piège. Tenez. « J’ai lu quelqu’un dire : la grande littérature, elle parle d’amour et de mort, le reste c’est peanuts (cacahuètes). Parler d’autre chose que d’amour et de mort, c’est comme décortiquer des cacahuètes, deux cents pages sur autre chose que l’amour et la mort, c’est comme un grand tas de cacahuètes. Si tu parles de l’amour, mais pas de la mort, ce sera un petit tas de cacahuètes ; ce sera déjà quasi de la littérature, en bon chemin. »

Le Lecteur a savouré un petit tas de cacahuètes. Point trop petit. Encore qu’il eût volontiers décortiqué un second petit tas. Par exemple après avoir lu cette phrase-là : « Pourquoi les nerfs du cul sont-ils reliés au cerveau et de là produisent des phrases ? (pensai-je). » Ou bien encore : « Par ailleurs, cela ne sert rien d’accuser Jésus de s’être pris pour le fils de Dieu. On aurait mieux fait d’accuser Dieu de s’être pris pour lui-même. » Mieux encore ? « Un démocrate comme… je ne sais pas… Manuel Valls… est-ce que ça peut s’accorder en quoi que ce soit avec une forte poussée hormonale, faire image… »

Et Brigitte Lahaie ? Elle rôde. Elle frôle autant l’Auteure que le Lecteur. Elle guide en effet, parfois. Elle cause. « Le papotage n’est pas forcément l’équivalent de la cyprine, en littérature (je préfère prévenir). Je n’ignore pas ce qu’il y a de moralement condamnable à papoter de Brigitte, à la faire passer de modèle politique à persona, mais ça m’ennuie que dans cinquante ans on ne puisse plus savoir qui est ou vraiment fut Brigitte alors que son émission m’aura en quelque sorte fourni un patron possible de construction progressive d’une intelligence commune – au passage me tirant d’affaire. » !

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