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16 mai 2011

Les vaincus

vaincus

"Les vaincus"
Xavier BENGUEREL
(Autrement)

La guerre civile s'achève. Les vaincus fuient l'Espagne. Des centaines de milliers de réfugiés traversent la frontière et sont "accueillis" par la soldatesque d'un pays dont la "neutralité" leur fit outrage. Dans ce roman vieux d'un bon quart de siècle, Xavier Bengurel raconte son exil. Ou, du moins, sa part d'exil. Puisqu'il fait intervenir d'autres personnages, d'autres de ces "vaincus" qui n'avaient sans doute pas imaginé que le pire puisse se rencontrer de l'autre côté de la frontière. En cet autre pays catalan intégré, lui, au sein de la nation française.
La France apparaît dans ce qu'elle propose d'infiniment médiocre, dans son refus de l'autre, dans ce qui se ressent déjà des tragédies à venir. La France, qui n'est pas réductible au seul état français, n'a guère accordé d'assistance aux républicains espagnols. Elle n'accueille pas les réfugiés. Elle les interne et les contraint à survivre dans d'effroyables conditions.  "Pire que des bêtes. On n'avait même pas d'étable, pas d'enclos, pas d'antre, pas de terrier. Là-bas, à Saint-Cyprien, on vivait sans abri, sans toit ni muret qui arrête le vent. Jusqu'à la terre qu'on ne pouvait pas toucher, impossible de s'abriter sous un arbre, de caresser un brin d'herbe, un roseau, de laper un peu d'eau qui ne soit pas saumâtre."
Xavier Bengurel met à nu les relations qui s'établissent entre les vaincus et ceux qui les observent sans la moindre aménité. Si tant que le mot "relation" ait encore dans du sens dans ces circonstances si particulières. "...un gros monsieur tout en rondeurs, ventru, solide et calé dans le fauteuil rouge de sa Citroën, nous dévorait du regard. En fait, c'est moi qu'il avait choisi pour son examen. J'ai baissé la tête parce que j'avais honte, parole d'honneur. La distance qui nous séparait alors était immense, aussi considérable qu'entre sa tripe et la mienne, entre son monde et mon monde: il avait une manière de me regarder, de haut en bas, de tout à rien, qu'à cet instant précis il m'a semblé que je cessais d'être un homme, qu'il m'obligeait à me considérer comme un chien galeux.... Si à cet instant le monsieur dans sa Citroën m'avait offert une pièce de monnaie m'avait offert une pièce de monnaie, peut-être que je lui aurais dit "merci", peut-être que je lui aurais craché au visage. J'ai tourné le dos pour ne plus être vu, pour ne plus me voir dans ses yeux répugnants..."
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