Canalblog
Editer l'article Suivre ce blog Administration + Créer mon blog
Publicité
Lectures
9 janvier 2010

Lectures 2009

ABOUDRAR Nassim : "Ici-Bas" (Gallimard). Un exercice littéraire plus qu'un roman. Tel est du moins le sentiment du Lecteur qui resta, tout au long des 399 pages, à la marge du propos de l'Auteur. Même si la juxtaposition de quelques destinées, au cours du 20° siècle, est d'ordinaire de nature à éveiller sa curiosité. Même si la confrontation et le métissage des cultures appartiennent au domaine de ses préoccupations. Le Lecteur ne tient pas grief à l'Auteur de son désenchantement (et non de son indifférence). Certaines rencontres littéraires, à l'âge qui est désormais le sien, relèvent parfois du superflu.

18 décembre 2009

 

 

 

ALI Monica" : Café Paraiso" (10/18). Un village de l'Alentejo, au sud du Portugal. Son café. S'y croisent quelques indigènes et des rapportés, des gens d'ailleurs. Tellement d'ailleurs que je n'ai toujours pas compris pourquoi ils avaient opté pour ce bout du monde.

28 avril 2009

 

 

 

AMIS Martin : "La maison des rencontres" (Gallimard). Mieux vaut relire la version originale. Celle de Soljenitsyne, "L'Archipel du Goulag".

30 janvier 2009

 

 

 

AMMANITI Niccolo :"Comme dieu le veut"(Grasset). Non. Je ne boude pas mon plaisir. J'ai dévoré ce (gros) roman sans jamais ressentir ce qui aurait pu être assimilable à de l'ennui. J'ai même freiné des quatre fers lorsque j'ai abordé aux trente dernières pages afin de différer mon approche (et donc ma connaissance) de l'épilogue. Ammaniti a, en quelque sorte, revisité le "Affreux, sales et méchants" de Scola. Doté d'un souffle qui hisse son roman au niveau de l'épopée. Nanti d'une ironie mordante. Tout plein de tendresse, d'affection, de respect à l'égard du "petit" peuple qui souffre, qui se tient à la marge de ce qui fut le progrès, qui en recueille les miettes et qui se débrouille avec le peu qu'il parvient à récupérer. Un sujet grave, traité avec sensibilité et intelligence. Un roman que je ne me lasse pas de feuilleter  pour y retrouver tant et tant de mes émotions!

9 janvier 2009

 

 

 

ANTUNES Antonio Lobo : « Chroniques 4 » (Bourgois)

Je vais faire comme si....

Comme si j'excluais du jeu le Lecteur.

Et, qu'en conséquence, je me réappropriais toutes mes prérogatives de lecteur.

Un exercice périlleux, au moment où je viens de refermer le tome quatre du "Livre de chroniques".

Les chroniques de Antonio Lobo Antunes.

A propos desquelles je n'hésite pas un seul instant à faire miennes les phrases qui accompagnent ses appréciations sur d'autres chroniques.

Celles de Augusto Abelaira (autre écrivain portugais, qui m'est totalement inconnu, celui-là):

"... je lisais ses chroniques, intelligentes et tolérantes, dépourvues de haine, très souvent ironiques, presque toujours discrètement affectueuses. J'ai tenté de lire ses livres: quoi que je pense de leur valeur

(d'ailleurs, peu importe ce que j'en pense)

il y a en eux la plus rare des qualités qu'un artiste doit avoir, et qui est celle, sans doute, que j'apprécie le plus: le sens éthique de l'écriture et de la vie, un travail patient, une fidélité absolue à sa façon d'envisager la littérature."

Au terme de la lecture du quatrième opuscule, que puis-je ajouter d'autre, moi, sur les chroniques libellées par Antonio Lobo Antunes?

Je vous le demande à vous que j'incite à vous hasarder dans ce qui vous sera peut-être une découverte, parmi les chroniques du quotidien d'un écrivain, un homme de mon temps, un homme de ma génération mais qui, lui, a vécu pour de vrai la guerre.

Celle que la vieille dictature portugaise laissait pourrir en Angola.

Celle dont le souvenir émerge de temps à autre, parmi ces textes qui me fascinent, m'éblouissent, m'émerveillent, y compris lorsqu'ils éveillent de stupéfiantes douleurs.

"Bataillon 3835, division Force et Audace. Le tirage au sort pour savoir qui irait conduire le véhicule de déminage... Nous étions si misérables, si désemparés, nous nous sentions si seuls que nous enviions presque le sort des amputés. Le coeur qui battait très vite et le calme au moment où ça commençait à tirer...... Dit de cette façon ça peut paraître idiot, de mauvais goût, mais j'ai eu du sang de mes camarades sur mes mains, sur mes bras, sur ma chemise. Du sang. Leur pauvre sang. Il n'est pas vraiment rouge, il est plus foncé. Je n'ai pas connu de héros. J'ai connu de pauvres hommes, pas même des hommes

(on se figurait être des hommes)

des gamins. La littérature, qu'elle aille se faire foutre

(pardon)

l'écriture, qu'elle aille se faire foutre

pardon encore. Maintenant, je vous le promets, je vais aller me laver les mains et je me remettrai à écrire les choses bien comme il faut. Mais, s'il vous plaît, comprenez-moi: soudain, ça revient comme un vomissement. Et j'ai honte d'être quelqu'un..."

Au bout du compte, lui, l'écrivain, et moi, le lecteur, qui l'un et l'autre naquîmes en 1942, qui l'un et l'autre avons traversé ce siècle révolu des mille et une guerres, rien ne peut nous interdire de revendiquer la "honte d'être quelqu'un".

Quoi que prétendent les angélistes, ces penseurs de quatre sous, ces philosophes de pacotille qui n'ont, eux, aucun péché à expier.

Puisqu'ils ne furent jamais rien d'autre que l'insignifiance.

Alors que chez Antonio Lobo Antunes, tout fait sens.

Il n'est pas un seul de ses livres, parmi ceux que j'ai lus, sur lesquels je ne me sois parfois longuement arrêté.

Comme je m'arrête, aujourd'hui samedi 5 décembre 2009, sur le tome quatre des chroniques.

Sans chercher à freiner la marche du temps.

"A soixante ans la mort n'aura pas à se fatiguer beaucoup pour m'attraper. De même que les pendules de ceux qui sont partis continuent à marcher à leur place, indifférentes, autonomes, je laisserai mes livres quelque part par là vivre le temps des autres. D'ailleurs je ne les ai jamais sentis comme miens pendant que je les écrivais: ils viennent je ne sais d'où, je ne sais comment, et j'ai juste à leur donner tout mon temps et à vider ma tête de tout le reste pour qu'ils grandissent par l'intermédiaire de ma main au bout de mon bras: mon bras m'apparient, mais ma main, en les transcrivant, appartient au roman, à tel point que son acharnement et sa précision me font peur. Il est peut-être préférable de dire que je ne les ai pas écrits: je me suis contenté de les traduire, et ma main est meilleure traductrice que moi..."

Je ne reproduis pas le livre. J'extrais quelques phrases, des lambeaux de paragraphes qui explicitent ou éclairent une proximité, des connivences. J'extrais, afin de faire naître la curiosité, l'envie, le désir peut-être.

Ca n'est pas tous les jours que s'opère ce genre de rencontre. J'entends par là la rencontre avec un écrivain, quelqu'un qui de livre en livre vous devient comme un ami, un confident, un frère.

Dans mes périmètres littéraires à moi, Antonio Lobo Antunes est de ceux là.

Je le dois à un éditeur d'exception: Christian Bourgois.

Dévoré par le crabe.

Mais à qui me proposa la rencontre avec Antonio Lobo Antunes.

A qui j'exprime mon infinie gratitude, ma reconnaissance.

Le chroniqueur, lui, évoque quelque part dans ce livre (vous prendrez bien le temps de chercher) la maladie de son ami l'Editeur:

"Mon éditeur, Christian Bourgois, est tombé malade, il a un cancer. Il m'a demandé d'aller le voir et j'ai passé une semaine avec lui, à Paris. Il souffrait beaucoup, ne pouvait rien avaler, ne pouvait pratiquement pas marcher, parlait avec difficulté, mais pas une plainte. Maigre, la tête tondue. J'ai dit à sa femme

- Ton mari a un immense courage

elle m'a répondu

- Ce n'est pas du courage, c'est de l'élégance

et j'ai compris que le courage est la forme suprême de l'élégance."

Voilà donc quelques reflets.

Les reflets de chroniques qui constituent comme autant de points de repères dans l'oeuvre d'un écrivain majeur. Des chroniques qui ne sont pas des îlots isolés les uns des autres. Mais auxquelles il est possible d'aborder sans se laisser guider par les contraintes chronologiques.

"Je veux que le lecteur soit avec moi. Qu'il me suive. Qu'il soit sourcier lui aussi. C'est pour ça que je refuse les anthologies, les collections, les ambassades, les groupes: je préfère être seul, et aller au hasard dans la campagne, avec ma baguette. Elle va s'abaisser, et mes lecteurs et moi avec elle... De renifler comme les bêtes, et de se mettre à creuser, creuser. Et en bas, sous beaucoup de terre, sous de nombreuses carapaces d'insectes, de nombreuses feuilles, de nombreuses racines, de beaucoup de pierres, le livre. Que l'on n'écrit pas, que l'on nettoie. Une occupation de mineur sans lampe sur le front jusqu'à ce qu'on trouve les gens et nous au milieu d'eux. Une profession de silence jusqu'à ce que les voix nous atteignent."

Il serait vain et superflu d'ajouter le moindre mot à tous ceux-là.

5 décembre 2009

 

AUDEGUY Stéphane : "Nous autres" (Gallimard). La découverte du Kenya par celui dont le père vient de se suicider sur cette terre africaine où des touristes se consacrent à des déracinements provisoires. Une découverte qui s'accompagne d'une rencontre post-mortem avec le géniteur. Si le récit de cette rencontre n'a pas pleinement convaincu le Lecteur, celui-ci s'est laissé emporter par le vent de la découverte. Stéphane Audeguy dénonce avec véhémence ce que le Lecteur assimile au néo-colonialisme. Tel ce court passage où sont évoquées les cultures florales, crées de toutes pièces par d'ingénieux bataves. "... le grand désert blanc des serres assèche non seulement le lac mais aussi la région tout entière, attire des centaines de camions, déverse dans le lac des engrais qui tuant les poissons ruinent tous les pêcheurs, et sous les bâches blanches, le bromure de méthyle qui brûle les yeux et les mains, qui s'infiltre dans les reins, et, selon les variations des marchés et des cours, laissant en mai des milliers de journaliers sans travail pour les réembaucher à la Saint-Valentin, à la Fête des Mères, le Kenya produisant maintenant le tiers des fleurs européennes." Le Kenya comme un reflet de notre monde globalisable? Le roman de Stéphane Audeguy apporte un regard tout plein de fraîcheur et de lucidité qui contraste avec la mièvrerie d'une bonne partie de la production des "grands" éditeurs de la littérature française.

8 mai 2008

 

 

 

AUSTER Paul : "Seul dans le noir" (Actes Sud). Plus qu'une relation littéraire, un ami. Enfin, comme le Lecteur l'entend. Fidèle, attentif, donc parfois déçu ou frustré. Mais toujours présent, et cela depuis une bonne vingtaine d'années. Plus que jamais au sortir de ce livre dévoré d'une seule traite. L'histoire que conçoit l'écrivain et qui se juxtapose à ce qui pourrait être une autobiographie. L'Amérique déchirée, en proie à une possible guerre civile et la retraite d'un vieil homme dans le Vermont, dans la proximité de sa fille et de sa petite fille. Ce roman ne se raconte pas. Il se savoure. Un objet littéraire non identifiable mais que le Lecteur s'engage à relire dans un très proche avenir. Pour le seul bonheur d'entretenir l'amitié évoquée ci-dessus.

6 mars 2009

 

 

 

ATTA Sefi : "Le meilleur reste à venir" (Actes Sud). Du moins faut-il l'espérer. Car voilà bien le type de roman qui laissa de marbre le Lecteur. Qui s'interroge. Suffit-il d'être africaine (et nigériane de surcroît) pour atteindre, si ce n'est à la gloire littéraire, du moins à la reconnaissance? Le doute est permis, non? D'autant mieux que l'Editeur lui-même ne semble guère avoir cru en la qualité son produit. En témoigne une traduction atteignant là encore aux limites supérieures de l'intolérable.

9 juillet 2009

 

 

AXIONOV Vassili : « Terres rares » (Actes Sud). Comme une histoire du post-soviétisme et l'irruption dans l'univers capitaliste des jeunes loups affamés issus de la matrice bolchevique. C'est parfois drôle. Mais le Lecteur considère tout de même que ce roman russe, si peu iconoclaste, s'inscrit sans vergogne dans l'air du temps.

22 octobre 2009

 

 

BANKS Russel : "La Réserve" (Actes Sud). Comme une déception. Qui résulte de mon attachement à cet écrivain américain, à son oeuvre. Ici, l'histoire de la riche héritière qui se conjugue à celle d'un peintre qui fréquente les grandes pointures de son temps (Dos Passos, Hemingway.....), ces histoires superposées sont cousues de fil blanc. Même si la Guerre d'Espagne sert de toile de fond au récit. Je me suis tenu à distance respectable de ce roman "hollywoodien". Peu ou pas du tout convaincu. Malgré l'épaisseur concédée à quelques personnages "secondaires". Dont l'épouse du peintre, trompée, bafouée, raide dans ses bottes. Au bout du compte, un roman qui accumule de quoi fabriquer un film à la mode Eastwood. Ce qui n'a rien de déshonorant, au demeurant. Reste enfin que Banks demeure un remarquable "raconteur" de la nature, en l'occurrence, et pour ce roman, les Adirondacks.

9 janvier 2009

 

 

BANKS Russel : "De beaux lendemains" (Babel/Actes Sud). Relecture. Qui ne modifie pas le ressenti initial. Voilà bien un roman qui fait mieux que convenir au Lecteur: qui appartient à cette littérature dont il loue la force, l'intelligence, la pertinence. L'accident d'un car de ramassage scolaire. Les morts. Le deuil. Mais surtout la façon dont une communauté villageoise américaine va intégrer le drame. Le tout sous le regard de quelques personnages proches ou étrangers de (à) l'événement.

9 août 2009

 

 

BASS Rick : "La vie des pierres" (Bourgois). Bass est à classer parmi les plus importants romanciers américains traduits en français. Le Lecteur se répète? Il en a le droit. "Qui aime ne compte pas", prétendent quelques-uns. Dans cet ouvrage qui additionne nouvelles, récits et profession de foi, le Lecteur s'est laissé séduire par ce qui, dans l'exercice littéraire, est le plus abouti. Donc les nouvelles et les récits. C'est pourtant dans la profession de foi écologiste qu'il extrait le paragraphe qui lui est le plus immédiatement sensible. Puisqu'il vécut son enfance dans l'environnement des arbres et de la forêt.

"J'aime tout ce qui se passe au cours des cent, deux cents, trois cents ans de la vie d'un arbre - la glace et la neige, les tornades, les incendies qui couvent à l'orée de certaines forêts et en traversent d'autres de part en part, ce qui fait repartir tout le processus de zéro, en laissant derrière eux une sorte de pause sacrée, une interruption momentanée avant que la végétation ne recommence à pousser et à grandir, aussi vigoureuse qu'auparavant."

Témoin de l'agonie d'un milieu mis à mal par les activités humaines, Bass ne s'enlise pas dans le conformisme hulotien. Bass démonte, détricote le système. Qui est d'abord et avant tout le système capitaliste. Avec tous les excès propres au capitalisme américain. Mais ses personnages qui, souvent, sont comme une part de lui-même, ne cessent de chercher les solutions individuelles et collectives pour tenter d'enrayer l'irrémédiable.

(Le Lecteur exprime en aparté le sentiment diffus de s'être, une fois encore confronté à une traduction incertaine, peut-être même bâclée....)

9 juillet 2009

 

 

BATTISTI Cesare : "Jamais plus sans fusil" de (Editions du Masque). Ouvrage acheté pour une somme dérisoire aux puces de Palavas. Polar évidemment politique. Ou comment les années de plomb reviennent à la surface une vingtaine d'années plus tard, alors que quelques uns des protagonistes se sont confortablement reconvertis qui dans le politique consensuel, qui dans le journalisme lui aussi consensuel. Puisqu'il s'agit d'un polar, le Lecteur n'entrouvrira pas le rideau noir. Il précise simplement que ce roman est celui qui lui paraît le plus abouti dans l'oeuvre de Battisti.  

22 août 2009

 

 

BELEZI Mathieu : "C'était notre terre" (Albin Michel). Le roman que le Lecteur attendait. Depuis plus de quarante cinq ans. Lui qui émergea d'une sorte de néant au cours de cette putain de guerre d'Algérie, qui se dépêtra comme il le put du colonialisme franchouillard enseigné, planisphères à l'appui, par les hussards noirs de la République. Lorsqu'il s'est insinué dans le roman de Belezi, il a d'abord eu la douloureuse impression de devenir la victime d'une sorte de jeu de dupes. Tant le romancier lui parut entretenir ambiguïté en accordant à chacun de ses protagonistes l'autorisation d'observer et de décrire l'histoire à travers les miroirs déformants de leur subjectivité. Sauf que très vite, les fils se renouent entre eux, les évocations et les récits se juxtaposent. Le colonialisme franchouillard transparaît alors dans toute son ignominie. Sans qu'il ait jamais été besoin pour le romancier d'user de la caricature. La vielle famille de colons que Belezi met en scène se fissure puis s'exhibe dans ce qu'elle a souvent de pire. Jusqu'à ce que survienne cette putain de guerre. Jusqu'aux abominations perpétrées au nom de ce droit à la possession qui niait d'autres droits, ceux des autochtones. Ce roman n'est évidemment pas l'Histoire, l'Histoire ne constituant que son matériau de base. Ce roman n'est rien d'autre qu'un très grand moment, un trop rare moment de vraie littérature. Qui confronte le Lecteur non seulement à l'Histoire mais aussi aux suites de l'Histoire. C'est-à-dire à se pesant silence qui couvre depuis plus de quarante ans une guerre qui ne fut reconnue comme telle que depuis à peine plus d'une dizaine d'années, mais qui englobe surtout la si peu reluisante épopée du colonialisme franchouillard.

22 août 2009

 

 

BELLATIN Mario : "Jeu de dames" (Gallimard). L'Editouilleur, dans son texte de présentation, établit une corrélation entre l'Ecrivain et Lynch. Le Lecteur n'a vécu, Lui, qu'une brève incursion dans la bourgeoisie mexicaine. Pas plus reluisante que la bourgeoisie française.

28 avril 2009

 

 

BENACQUISTA Tonino : "Malavita encore" (Gallimard). La suite du précédent ("Malavita"). Ce vrai faux polar accumule tous les poncifs du genre. Mais il se laisse lire, ce qui constitue déjà un point positif. Et le Lecteur, arrivé au terme de l'exercice en ressort avec le pressentiment que Benacquista apportera un troisième volet à l'histoire du mafieux repenti et de sa famille.

15 septembre 2009

 

 

BERGER John : "De A à X" (L'Olivier). Voilà un roman qui propose un saisissante approche du monde au sein duquel le Lecteur s'efforce de survivre. Un homme est incarcéré pour d'évidentes raisons politiques. Sa compagne lui transmet des lettres au long desquelles elle conjugue ou additionne les reflets de la vie quotidienne d'une contrée soumise aux dures lois de la guerre, donc à l'arbitraire. C'est donc par touches successives que John Berger peint un tableau effrayant, mais ô combien pertinent, de ce monde. Un monde dont il serait immoral de tenter de s'abstraire. Notre monde, puisque l'arbitraire se perpétue jusque dans ce qui constitue notre espace commun.

J'ajoute qu'il faut oser citer Frantz Fanon. "Non, nous ne voulons rattraper personne. Ce que nous voulons, c'est avancer tout le temps, de nuit comme de jour, main dans la main avec l'Homme, main dans la main avec tous les hommes. La caravane ne doit pas trop s'étirer car, si elle s'étire, ceux qui la composent ne se distinguent plus; et les hommes qui ne se reconnaissent plus se rencontrent de moins en moins, et se parlent de moins en moins." John Berger a osé restituer un fragment de la mémoire de Frantz Fanon. Le Lecteur lui emboîte le pas.

15 septembre 2009

 

 

BERGOUGNIOUX Pierre : "L'empreinte" (Fata Morgana). J'aime la littérature de Pierre Bergougnioux, cet art qui lui est si particulier d'évoquer les lieux de son enfance (Brive, la Corrèze). J'aime son écriture. Je voue un très grand respect à cet éditeur, Fata Morgana. Le reste ne serait qu'accessoire.

27 mars 2009

 

 

BERGOUGNIOUX Pierre : "Une chambre en Hollande" (Verdier). Le Lecteur se ressent de nombreuses affinités avec Bergounioux (Pierre). Culturelles, donc littéraires. Sociales et politiques. La fulgurante rencontre avec Descartes, les quelques pages consacrées à l'émergence du "Discours de la Méthode" ne relèvent pas de la biographie. L'exercice vise plutôt à éclairer le pourquoi (plus que le comment) de la naissance d'une oeuvre. Une oeuvre dont Bergounioux laisse entendre qu'elle l'a aidé à orienter sa vie. Mais avec tant de pudeur, tant d'austérité dans la syntaxe et dans l'écriture que l'implication de l'auteur se confine dès lors à la marge.

15 septembre 2009

 

 

BESSA-LUIS Agustina : "La ronde de nuit" (Métailié). Le Lecteur reconnaît sa perplexité. Voici un roman portugais d'excellente facture. Qui eût pu servir de canevas à Visconti (ou à Manoel de Olieira, dont la romancière est la scénariste). Le Lecteur résume. L'ultime avatar d'une famille portugaise se confronte à "La Ronde de Nuit", oeuvre non signée de Rembrandt, oeuvre dont il fut l'héritier. Jusqu'à ce que la jalousie produise ses effets dévastateurs et que cette oeuvre-là soit détruite. Un monde s'achève: tout autant celui que le peintre mit en scène que celui qui assume l'héritage. La perplexité du Lecteur résulte de la densité même du récit, des nombreux flash-back, d'une multitude d'interférences. Comme s'Il s'était refusé à se laisser emporter par le récit. Un refus qui est peut-être la conséquence d'une humeur vagabonde en cette saison des frivolités renaissantes.

8 mai 2009

 

BOLANO Roberto : "2666" (Bourgois). Voilà sans doute le roman que le Lecteur aurait aimé écrire. Mais le Lecteur n'est pas assimilable à Roberto Bolano. Il se limite donc à l'accomplissement de ses fonctions. Qui lui procurent, à leur modeste niveau, d'intenses satisfactions. Ce roman-là tient du prodige. En d'autres circonstances, j'ai déjà exprimé tout le bien que je pense de la littérature de Roberto Bolano. Mais avec "2666", mon enthousiasme outrepasse les limites que je m'assigne d'ordinaire. Ce texte-là, tout au long de son millier de pages, atteint en effet à l'universel. Puisqu'il aborde à la quasi totalité des genres. Puisqu'il a entraîné le Lecteur sur les terres qui furent celles des exils de Roberto Bolano. L'écrivain chilien, décédé en 2003, compte aux yeux du Lecteur parmi les plus foisonnants créateurs de la littérature contemporaine. "2666" s'apparente à une sorte d'apothéose Il suffit de prendre le temps de s'y immerger, de partir sur les traces d'un vieil écrivain allemand dans la compagnie de quelques universitaires. Le temps, tout le temps nécessaire à une lente et savoureuse imprégnation. Le reste ne se raconte pas.

12 février 2009

 

 

BORZEIX Jean-Marie : "Jeudi saint" (Stock). 6 avril 1944. L'armée nazie, qui anticipe sur le débarquement, commence à refluer vers les côtes normandes. Les hordes SS se livrent à des "exactions" (mot fort à la monde pour qui veut s'éviter de décrire l'abomination) dans quelques villages de Haute-Corrèze. Dont le massacre de celles et ceux qui apportent leur aide à la Résistance. Mais aussi quelques juifs qui avaient cru trouver un refuge fiable dans les coins les plus reculés du Limousin. Les SS laissent derrière eux des cadavres. Dont ceux de quelques juifs inclus dans l'anonymat collectif des millions de morts de la Shoah mais absents des monuments où s'additionnent les noms de celles et ceux qui "donnèrent leur vie"  pour la France. Au terme d'une longue et patiente enquête, Borzeix parvient à reconstituer les derniers instants d'un réfugié juif fusillé pour l'exemple et à retrouver les enfants du sacrifié. Un exercice plutôt réussi sur la mémoire et sur ce que ceux qui écrivent cette histoire en font.

J'ajoute que Borzeix mentionne plusieurs fois, dans ses évocations de la Résistance, un petit village de ces recoins perdus du Limousin. Tarnac. Etrange et évocateur rapprochement sur "l'esprit de Résistance"? Que l'Auteur n'avait évidemment pas anticipé, puisque son enquête s'acheva au cours de l'été 2007. Mais qui renvoie à certaines des questions formulées par Mona Ozouf dans cette composition tellement française qu'il devient urgent de reconnaître que la République est une construction qui est très loin encore de son achèvement.

30 juin 2009

 

 

BOURAOUI Nina : « Appelez-moi par mon prénom » de Nina BOURAOUI (Stock). Nina. Dont le Lecteur s’était épris lorsque parut le premier roman (« La voyeuse interdite ») et que l’auteure promena sa jolie frimousse devant les caméras des télévisions. « Appelez-moi par mon prénom » constitue comme une sorte de plongée dans l’insignifiance. Ce qui aurait pu s’avérer désopilant. Ce qui, au bout du compte, se révèle d’un ennuyeux fort commun, caractéristique majeure d’une certaine littérature franchouillarde.

10 août 2009

 

 

BOSONETTO Marco : "Grand-père Rosenstein nie en bloc" (L'Esprit des Péninsules). Une très heureuse surprise: le Lecteur fouine parmi les occasions proposées par Gibert Jeune et découvre cet ouvrage dont il fait l'acquisition pour l'euro symbolique. Un truculent roman! L'histoire d'un vieux juif, rescapé d'Auschwitz, et qui, au fil du temps, devient négationniste. Au point d'avoir à ses trousses toutes les pires engeances des fascismes, intégrismes et néo-nazismes internationaux. Face à cette meute, le petit-fils du vieux juif et quelques comparses. Ce roman se savoure. Jusqu'à la dernière ligne!

22 août 2009

 

 

BOYDEN Joseph : "Les saisons de la solitude" (Albin Michel). Comme un retour vers l'enfance. Du moins pour le Lecteur qu'exaltèrent, il y a bien longtemps, les romans de London, de Curwood, de Cooper. Le Grand Nord Canadien. Indiens et trappeurs. Un monde d'aujourd'hui qui est celui dans lequel Boyden fait évoluer ses personnages. Dans un récit à deux voix: celle du vieil oncle englué dans un coma apparemment irréversible et celle de sa nièce qui affronte, elle, ce que la "civilisation" génère de pire. Entre ce qui fut et ce qu'il advient, au rythme des saisons, dont cet hiver si long. Avec ce que la "civilisation" concède: l'alcool et les autres drogues. La fin d'un monde, celui de sociétés inadaptables aux contingences de la modernité? Pas si sûr. C'est du moins ce que suggère Boyden au terme des aventures conjointes de l'oncle et de sa nièce. Ce qu'il faut prendre le temps de découvrir tout au long de la lecture de ce roman foisonnant. Qui renvoie aux grands classiques évoqués ci-dessus, mais aussi aux contemporains dont le Lecteur fait d'ordinaire ses délices: Harrison,  Bass, Banks.....

23 novembre 2009

 

 

BRAMI Emile : "Emile l'africain" d'Emile (Fayard). Emile ne s'aime pas. C'est son affaire. Mais son chemin croise celui d'une déchéante. De cette rencontra naît un bouquin qui interroge sur l'indifférence, les médiocres lâchetés.

30 janvier 2009

 

 

BURKER James Lee : « Dernier tramway pour les Champs Elysées » (Rivages). Le Lecteur ne s'intéresse presque plus aux polars. Lui qui en dévorait plusieurs dizaines chaque mois. Au temps de ses voyages missionnaires, dans les trains ou dans les avions. Mais pour rien au monde, il n'ignorerait les romans de James Lee Burker. A ses yeux, un des plus grands parmi les plus grands. Ce "Dernier tramway" est un pur chef d'oeuvre. Noir de noir. Au plus profond de cette Amérique réactionnaire, raciste, puritaine. La Louisiane. Un polar ne se raconte pas. Le Lecteur ne fournira donc pas le moindre indice. Il précise toutefois que l'oeuvre résonne comme un blues ou, plus exactement, comme une série de blues qui s'entremêlent pour chanter les souffrances, le mal vivre, nimbés de ces fugitives étincelles qui scandent ce qui pourrait ressembler à un espoir diffu. Mais au fait, polar? N'est-il pas temps d'abattre les cloisons étanches et de rendre à la littérature ce qui lui appartient!

22 octobre 2009

 

CARLOTTO Massimo et VIDETTA Marco: « Padana City » (Métailié). Un polar italien qui traite de la corruption de des liens interlopes entre la Mafia et les milieux d'affaires. Plutôt bien foutu. Agréable à lire. Telle est l'opinion du Lecteur. Toujours en attente de ce qui vient du côté senestre de la péninsule italienne.

(Juste une interrogation: à quand le polar versant corrupteurs et osant s'engluer jusqu'au pire de l'abjection?)

13 novembre 2009

 

 

CARVALHO Bernardo : "Le soleil se couche à Sào Paulo" (Métailié). Déçu. Ce roman reproduit ce qui m'avait séduit dans "Mongolia". L'effet de surprise ne joue donc plus. Carvalho réaffirme son attachement à l'Asie. Une vieille restauratrice japonaise installée au Brésil demande à une sorte de non-écrivain de mettre en forme ses mémoires. L'intrigue ne manque pas d'intérêt. Mais le souffle de l'inspiration est absent. Au point qu'il m'est arrivé de me demander si Carvalho n'était pas lui-même ce non-écrivain.

9 janvier 2009

 

 

CASTELLANOS MOYA Horacio : "Là où vous ne serez pas" (Les Allusifs). A coup sûr: un des très grands de la littérature latino-américaine contemporaine. Ce que j'avais pressenti lors de mes précédentes rencontres avec cet écrivain ("L'homme en arme", "Le bal des vipères"...). Ici, les derniers jours d'un homme qui fut ambassadeur du Salvador au Nicaragua. Donc un retour sur les guerres, les insurrections, les trafics en tous genres. Rien de glorieux. Aucune exaltation. Pas la moindre épopée. Tout, ou presque, se situe dans le sordide. Des hommes abîmés qui survivent à coups d'expédients. Une noirceur profonde. Que tempère un humour corrosif. "Là où vous ne serez pas" est un roman qui s'immerge dans ce temps de l'histoire qui n'a pas abouti sur la révolution mais produit une génération d'hommes arrivés à leur terme au prix d'infinies souffrances.

12 mars 2009

 

 

 

CHAR Yasmine : "La main de Dieu" (Gallimard). Voilà. Le Lecteur se doit de rappeler que son chemin a déjà croisé celui de l'Auteure. Un chemin qui ne fut pas un chemin de croix. Non. Plutôt un rendez-vous presque manqué, un rendez-vous que le Lecteur honora tout de même, comme en catimini. Pour des raisons indépendantes de sa volonté, certes. Mais qui trahirent ce jour-là comme une sorte d'ignorance des convenances, des rituels auxquels il est de bon goût de sacrifier.

Le Lecteur s'est donc introduit dans ce livre sans commettre la moindre effraction. Il l'a abordé avec quelques préjugés favorables. Des préjugés qui ont, sans aucun doute, modifié son regard. Mais qui n'ont pas pesé sur son jugement. Du moins en a-t-il la certitude.

Voilà donc un récit qui s'articule autour de nos barbaries contemporaines. Celles qui eurent pour cadre le Liban. Les années les plus noires de ce petit pays coincé entre Israël et la Syrie. Ce petit pays partagé entre ceux dont les croyances puisent aux mêmes sources. Des communautés arc-boutées sur leurs vérités respectives. Un petit pays où l'on massacra l'autre au nom d'un dieu dont la main était sensée bénir ou guider la balle destinée à anéantir cet autre aux convictions déviantes.

Yasmine Char a vécu la déchirure. Il n'est pas simple pour le Lecteur de démêler dans son roman ce qui relève des domaines respectifs de la fiction et de l'autobiographie. Ce qui n'a, au bout du compte, que peu ou pas d'importance. Sauf que dans l'exercice si particulier du "mentir vrai" dans lequel semble exceller l'Auteure. ce même Lecteur s'est évertué à se trouver des issues qui lui permettent de retrouver l'adolescente. Une adolescente qui est la narratrice. Une adolescente qui raconte "sa" guerre. Une guerre qu'elle n'est pas voulue puisque, par ses ascendants, elle appartient à l'un et l'autre camp. Mais une guerre dans les arcanes de laquelle elle s'introduit. Jusqu'à en devenir une actrice.

Voilà donc un exercice littéraire bien éloigné de ces angotteries ordinaires qui font les délices des éditeurs que ravissent les immersions nombrilistes, les contemplations exacerbées de l'ego. Ici, aucune descente en apnée dans les eaux glauques des marigots franchouillards. Bien au contraire, une tentative d'atteindre aux abîmes collectifs, de les explorer, d'en révéler les turpitudes. Ce qui demande du souffle, beaucoup de souffle.

La question accessoire est celle de l'irruption en littérature d'une jeune femme que le Lecteur classerait dans la catégorie des "surdouées". A une nuance près: Yasmine Char a accompli, avec ce roman si court et si dense, le pas qui coûte le moins. Celui qui conduit à ces questions si sensibles du Moyen Orient. Dans une œuvre singulière qui n'est sans évoquer les tragédies antiques. Mais qui interroge sur le devenir. Le devenir de cette Auteure à laquelle il sera beaucoup demandé.

9 août 2009

 

 

CHAR Yasmine : « A deux doigts » (Editions Favre/Lausanne). Ainsi donc, Yasmine Char avait fait, en 1984, une entrée discrète en littérature (tellement discrète que l’éditeur Gallimard n’avait pas cru bon de mentionner ce premier roman, du moins si la mémoire du Lecteur ne l’abuse pas). Discrète certes, mais déjà révélatrice. Puisque les « deux doigts » laissent entrevoir quelques uns des thèmes qui donneront, quelques années plus tard, chair à « la main de dieu ». Et que, chez Yasmine Char, le verbe transgresse quelques tabous et devient chair à travers les jeux subtiles du mentir vrai. Jeux au cours desquels s’exacerbent les désirs qu’une jeune femme enclot (ou n’enclot pas, puisqu’elle joue au mentir vrai) dans les territoires (solitaires ou partagés) de la fantasmagorie. Le Lecteur ne lèvera donc pas le voile. Il se contente d’exciter la curiosité de celles et ceux à qui s’adresse cette chronique.

10 août 2009

 

 

CHESSEX Jacques : "Un juif pour l'exemple" (Grasset). Une grande claque dans la gueule. Le Lecteur n'est pas prêt de s'en remettre. Il résume. 1942. Jacques Chessex a huit ans. Il vit alors dans une petite ville vaudoise où s'est constitué un groupe d'admirateurs du Führer. Quelques individus ordinaires. Qui vont, eux aussi, exterminer "leur" juif. L'histoire est authentique. Mais le récit est écrit avec tant de sobre intensité qu'il atteint au tragique. Le Lecteur entend par là à l'universel. Pas la moindre complaisance dans le propos de l'Auteur. "Je raconte une histoire immonde et j'ai honte d'en écrire le moindre mot. J'ai honte de rapporter un discours, des mots, un ton, des actes qui ne sont pas les miens mais qui le deviennent sans que je le veuille par l'écriture." L'effroyable blessure ne se refermera jamais. Il serait même absurde de vouloir la cicatriser. Puisqu'il est nécessaire que l'humanité soit à tout jamais confrontée au pire d'elle-même. Afin de s'en prémunir?

10 juin 2009

 

 

CHIRBES Rafael : "Crémation" (Rivages). Le Lecteur retiendra de ce roman si dense, si touffu, à la limite parfois de l'inextricable les pages au long desquelles, Ruben, le frère du mort (Matias), se raconte. Architecte devenu promoteur dans l'Espagne de l'après Franco. Englué dans la pourriture. Affairiste obscène. Des pages qui vibrent d'une étrange et obsédante intensité. Qui offrent une multitude de reflets sur les sociétés où le fric constitue la seule valeur de référence. Avec, tout autour de ce personnage central et du cadavre de son frère, le théâtre d'ombres sur la scène duquel évoluent, furtives, quelques femmes, mères, soeurs, amantes, épouses, prostituées. Mais aussi un ramassis de voyous, de traîtres, de spadassins. Un saisissant et brutal reflet d'un monde en voie d'achèvement. Le Lecteur reviendra vers cet ouvrage qui lui semble d'ores et déjà appartenir au tout meilleur de la littérature espagnole contemporaine (du moins de celle qu'il est autorisé, barrières de la langue obligent, à fréquenter).

2 décembre 2009

 

 

CIRIEZ Frédéric : "Des néons sous la mer" de FrédéricVerticales). Souvent drôle, l'histoire de ce sous-marin et de ses navigatrices. 2012. La raie publique décrète la réouverture des bordels. Quelques dames de grande vertu s'associent et redonnent une seconde jeunesse à un bâtiment désaffecté par la marine nationale. Tout cela en baie de Paimpol, sous le regard du tenancier du vestiaire. Au bout du compte: un plutôt agréable moment de divertissement.

9 janvier 2009 

 

 

 

CLEMENCON Frédérique : "Traques" (L'Olivier). Quatre personnages se refusent à se laisser enfermer dans les normes que la société s'évertue à leur imposer. Afin de survivre. A travers des actes apparemment anodins. Dans l'expression de leur refus de la soumission qui se conjugue parfois à une pernicieuse résignation. Mais pour le Lecteur, le côté plutôt subversif du roman s'étiole derrière l'écran d'une écriture sans aspérités, d'une écriture conforme à des normes héritées, chez Frédérique Clémençon, d'un (trop long?) séjour aux Editions de Minuit.

18 décembre 2009

 

 

COE Jonathan : "La pluie, avant qu'elle tombe" (Gallimard). L'immersion dans les abîmes. Les mystères, les secrets qui jalonnent l'histoire d'une famille anglaise. Le tout observé, analysé, décortiqué par une vieille dame qui, au terme de sa vie, confie tout ce qu'elle a mémorisé à un magnétophone. Un héritage qu'elle lègue à une jeune femme dont elle ignore ce qu'elle est devenue. De sombres et douloureux instants, comme toujours lorsque l'on se livre à ce genre d'exploration. Le roman fut parcouru sans que jamais le Lecteur ait ressenti le moindre ennui, mais sans qu'il se soit jamais vraiment senti concerné. Seule sa curiosité l'a poussé à atteindre le terme du récit.

28 avril 2009

 

 

COUTO Mia : "Un fleuve appelé temps, une maison appelée terre" (Albin Michel). L'art indéniable du conteur. Le Mozambique de Couto, entre son passé colonial et son présent nimbé de déceptions et d'amertume. "Ce n'est pas que je n'aie pas confiance dans l'humanité. C'est que j'ai cessé de faire confiance aux hommes…"  La mort de l'aïeul ramène le narrateur sur l'île de son enfance. Le monde, son monde, n'a pas changé. Malgré l'indépendance, malgré la "révolution". Pire même: il se dégrade. L'art poétique de l'auteur ne suffit peut-être pas (c'est du moins l'opinion du Lecteur) à éviter à la confrontation entre l'hier et l'aujourd'hui une certaine indolence.

9 août 2009

 

 

CUSSET Catherine : "Un brillant avenir" (Gallimard). Je me suis laissé emporter, sans le moindre déplaisir, par ce roman. Sans enthousiasme excessif non plus. Non que le récit manquât de saveur. Bien au contraire. L'itinéraire qui conduit Elena et Jacob de la Roumanie de Ceausescu jusqu'aux Etats-Unis (via Israël)est à l'identique de celui qu'empruntèrent de nombreux ressortissants venus, au cours de la seconde moitié du 20° siècle, des pays du bloc soviétique (dont de très nombreux juifs). C'est plutôt bien raconté. Tellement bien que surgit parfois l'interrogation: "Et si c'était trop beau pour y croire?". Croire que de l'autre côté de l'Atlantique se résout la quasi totalité des problèmes parmi tous ceux qui demeurent en jachère non seulement sur le vieux continent, mais également du côté de Tel-Aviv et de Haïfa. Et puis, une écriture inégale, parfois inaboutie, nuit au roman de Catherine Cusset.

9 janvier 2009

 

 

DELAUME Chloé : "Dans ma maison sous terre" (Seuil). Qu'il fut réticent, le Lecteur, après qu'il eut parcouru les dix ou vingt premières pages de ce roman. Lui qu'insupportent les angotteries ordinaires. Et puis, il a daigné pousser la porte du cimetière et il a cheminé parmi les tombes. Il s'est laissé non point attendrir par les secrets de famille qu'explore Chloé mais subjuguer par le récit morcelé d'une tragédie moins ordinaire qu'il n'y paraît. Chloé Delaume a-t-elle réussi à faire des débris à peine rassemblés de sa propre histoire une fiction romanesque? Le Lecteur en est quasiment persuadé.

4 juin 2009

 

 

DEL AMO Jean-Baptiste : (Gallimard). Devoir à peine passable d'un élève de seconde littéraire ayant effectué de trop fréquentes incursions dans la zone naturiste du Cap d'Agde. Le Lecteur lui infligerait volontiers une punition: recopier cent fois "Esquisses pour un portrait du vrai libertin" de Roger Vailland!

4 juin 2009

 

 

DELLILO Don : "L'homme qui tombe" (Actes Sud). Encore une fois le hasard des disponibilités sur les rayonnages de la bibliothèque de Montpellier. Puisqu'il existe une évidente parenté entre le roman de l'américain et celui de la yougoslave. Le recours, pour l'une comme pour l'autre, au matériau historique comme socle du récit. Chez Delillo, la matinée du 11 septembre 2001. Sans rien de tout ce qui constitue l'ordinaire des témoignages sur ce drame hors du commun. Les bons sentiments. Le repli identitaire. Entre autres. Rien de cela chez Delillo. Mais, au contraire, une sorte de subtile allégorie. Le tableau d'une apocalypse. La fin d'un monde. L'errance du survivant dans un environnement qui plus jamais ne sera à la ressemblance de ce qu'il fut. Le rêve américain qui s'achève dans le brasier d'un enfer. Voilà bien, là encore, un roman d'exception. Tant il contraint à observer les tumultes d'aujourd'hui sans le moindre a priori, comme une sorte de prolongement, et non un post-scriptum, à l'histoire des heures les plus sombres de l'humanité.

9 janvier 2009

 

 

DESBIOLLES Maryline : "Les draps du peintre" (Seuil). Depuis belle lurette, le Lecteur s'est épris de l'art d'écrire qui fait de chaque livre de Maryline Desbiolles un véritable joyau. La fluidité de cette écriture. Le rythme et le souffle de chaque phrase. Sans rien de ces joliesses dont tant d'autres abusent. Mais l'art d'écrire ne déboucherait sur le vide s'il n'y avait, pour l'accompagner, l'extrême densité du récit. Qui n'est,celui-ci, évidemment pas une biographie du peintre pas nommé (Jean-Pierre Pincemin?), exercice qui, de toute évidence n'intéresse ni ne concerne Maryline Desbiolles. A chacun son boulot. La romancière écrit des romans. Une activité dans laquelle, aux yeux du Lecteur, elle excelle. "Les draps du peintre" doit donc être abordé avec la seule volonté, le seul désir de participer à la quête (qui ne se confond pas avec l'enquête) des lambeaux d'une existence. Celle d'un peintre, un autodidacte pleinement engagé dans les courants artistiques des années 70. Une existence qui ne se réduit pas aux seuls gestes de la création, qui induit le rapport aux autresmais aussit à ce monde au sein duquel ils survivent. L'oeuvre de Maryline Desbiolles questionne, dérange, interpelle. Son originalité et sa pertinence, au-delà de l'écriture accomplie, situent l'écrivaine à un niveau d'exception.

"Et lente encore la petite mort qui verse dans la grande. Et lentes les ratures, les tremblements de la voix éteinte, la voix venue de l'autre rive, l'autre lèvre, nos lèvres se retrouvent, j'ai goûté la mort, et toi qu'as-tu goûté? Ta brume est dans mon grand beau temps qui s'avance."

8 mai 2009

 

 

DETAMBEL Régine : "Noces de chêne" (Gallimard). Dans ce roman aussi, de vieilles gens. Un homme et une femme internés dans ce que l'on appelle, pour la commodité, une maison de retraite. La femme disparaît. L'homme part à sa recherche. Dans cette oeuvre detambellique à souhait, le Lecteur n'aura, au bout du compte, goûté qu'à la description du Ventoux, montagne mythique. Le cheminement d'un vieillard sur les routes maintes fois empruntées par les forçats du tour de France (des cyclotouristes dans le roman de Detambel) fut suivi d'un regard à la fois attentif et curieux par le Lecteur.

12 mars 2009

 

 

DIADHIOU Massamba : "Oedipe, le bâtard des deux mondes" (L'Harmattan). Ce roman est arrivé jusqu'au Lecteur par des voies détournées. Le tout premier roman d'un tout jeune apprenti en littérature. Qu'accompagnent donc de nombreuses "imperfections". Dont l'écriture semble osciller, sans jamais vraiment choisir, entre les deux univers culturels de l'Auteur: le Sénégal et la France. Deux pays qui sont les "patries" de son narrateur, né de l'union éphémère d'une maman africaine et d'un quelconque médecin du monde (bien que français), volage de surcroît. Un narrateur qui, en son jeune âge d'homme, part à la recherche de ses géniteurs et découvre donc certaines des réalités hexagonales. Lui qui a le cul entre deux mondes. Au-delà du récit "imparfait" d'un éveil et des rencontres qui l'accompagnent, ce roman excelle dans les virulents paragraphes qui dénoncent les turpitudes des deux systèmes, celui d'ici et l'autre de là-bas. Au bout du compte, le Lecteur se prend du désir de donner un coup de pouce à Massamba Diadhiou, écrivain en devenir. Jusqu'au point de vous contraindre à lire ce roman-là?

20 avril 2009

 

 

DIAZ-ETEROVIC Ramon : "La couleur de la peau" (Métailié). Un  polar chilien truffé de références littéraires et poétiques et qui se placent sous le patronage de Simenon et de Léo Mallet. Un polar qui ne révolutionne pas le genre. Mais qui se parcourt sans ennui. Et qui met à nu certaines des plus sordides réalités du Chili contemporain. Là où, de toute évidence, la couleur de la peau peut aussi poser problème.

27 mars 2009

 

 

DILLARD Annie : "L'amour des Maytree" (Belfond). De l'émergence d'un jeune amour à sa résurgence aux dernières heures de la vie. Le Lecteur résume et caricature sans doute le propos d'Anne Dillard. Au-delà du récit qui entrecroise les destinées de deux femmes et d'un homme, ce roman d'une âpre beauté, d'une infinie pudeur, interroge sur le sens que chacun d'entre nous donne à sa vie. Cette liberté dont chacun semble disposer. Dont on ne sait trop souvent que faire. Dont les femmes font, au bout du compte, un bien meilleur usage. Le lecteur ne lèvera pas le voile sur les tenants et les aboutissants. Il précise toutefois que les pages sur la question de la vieillesse et de la mort sont parmi les plus belles, les plus bouleversantes qu'il ait jamais lues. Et puis, il fut séduit par le talent d'une romancière, qui telle une impressionniste, offre une succession de tableaux lumineux de la pointe du Cap Cod. L'appréciation du Lecteur n'est en aucun cas outrée, puisqu'elle résulte d'une émotion et d'un ressenti qui ne s'édulcorent pas.

 12 mars 2009

 

 

DONOVAN Gerard: "Julius Winsome" (Seuil). Les grands espaces du Nord des Etats-Unis (en l'occurrence, l'état du Maine). Un homme qui a choisi la solitude. Dans un environnement d'autres solitudes librement consenties. Au coeur d'un pays de traditions. Dont la chasse en constitue le dénominateur commun. Sauf pour Julius Winsome. Mais qui, après qu'il eût recueilli son chien agonisant, va se lancer dans la quête d'une pureté absolue à travers la répétition d'actes rédempteurs. Ce roman américain d'un écrivain irlandais s'inscrit parmi les plus fastueuses de ses découvertes littéraires de l'an 2009.

18 décembre 2009

 

 

 

DURIF Eugène : "Laisse les hommes pleurer" (Actes Sud). Un écrivain que je n'avais jamais fréquenté. Un roman âpre et douloureux qui conjugue deux destinées. Celle d'un "sans parents" et celle d'un déporté, enfant réunionnais transféré dans la Creuse. Recueillis par des Thénardier, paysans exploiteurs des misères enfantines. Devenu adulte, le "sans parents" part à la recherche de son compagnon d'infortune. Ce court roman qui évoque plusieurs fois le "Sans Famille" d'Hector Malot aborde à ces histoires que la mémoire collective enfouit dans des culs de basse fosse. Il mérite donc toute votre attention.

6 mars 2009

 

 

DUTEURTRE Benoît : "Les pieds dans l'eau" (Gallimard). Le Lecteur, qui lui aussi a ses nostalgies, s'est laissé prendre au piège de ce roman. Le roman de la lente agonie d'un monde. Etretat, et ses falaises, bien évidemment. Etretat, station balnéaire qui, en un demi-siècle, passe de la tutelle des bourgeoisies normandes et parisiennes à celle des épiciers et des pharisiens de tous bords. Une transition observée par l'arrière petit-fils du dernier président de la quatrième république, René Coty. Le Lecteur a apprécié sans gêne ni retenue les tableaux qui révèlent les transformations d'une société tout autant que ceux que l'auteur consacre à une famille ancrée dans le catholicisme dont, au bout du compte, elle ne sait plus trop quoi faire.

12 février 2009

 

 

DUTEURTRE Benoît : "Ballets roses" (Grassouillet et Flasquelle). L'évocation de l'affaire qui fit, à la fin des années cinquante, les délices de la Médiatouillerie n'a intéressé le Lecteur que dans le succinct rappel historique auquel s'est livré l'Auteur. Des années qui furent celles de l'adolescence du Lecteur, qui le conduisirent (il l'a déjà écrit) à une certaine conscience politique. Mais il se dégage de ce récit un moralisme bien pensant, donc consensuel, qui lui confère un côté réactionnaire. Comme si les turpitudes commises par le socialiste Le Troquer ne servaient qu'à justifier l'exigence d'un retour à un ordre ébranlé puis remis en cause par le séisme de Mai 1968.

4 octobre 2009

 

 

ENARD Mathias : "Zone" (Actes Sud). Un long survol (plus qu'une immersion à l'intérieur) des drames sanglants qui jalonnent l'histoire de quelques pays riverains ou proches de la Méditerranée. Le Lecteur a pris le temps de renouer les fils de cette sorte d'Iliade des temps modernes. Un siècle, le vingtième, au cours duquel s'accomplirent les pires barbaries. Il s'est efforcé de suivre les traces d'un agent de renseignement dont le voyage en train de Milan jusqu'à Rome lui offre l'opportunité de conjuguer ses souvenirs aux pires moments de cette histoire. Une oeuvre originale, une oeuvre à part dans une production littéraire française si gnangnanteuse.

4 juin 2009

 

 

ERNAUX Annie : "Les années" (Gallimard). Le Lecteur est tout abasourdi. Il regrette déjà d'avoir refermé ce qui n'est pas un roman. Il s'y était si confortablement installé que de s'en défaire éveille d'étranges douleurs. C'est que, sur le tard, il vient de rencontrer comme une grande soeur, sa soeur aînée. Par la vertu de ce livre. Son livre à Elle. "La forme de son livre ne peut donc surgir que d'une immersion dans les images de sa mémoire pour détailler les signes spécifiques de l'époque, l'année, plus ou moins certaine, dans laquelle elles se situent - les raccorder de proche en proche à d'autres, s'efforcer de réentendre les paroles des gens, les commentaires sur les évènements et les objets, prélevés dans la masse des discours flottants, cette rumeur qui apporte sans relâche les formulations incessantes de ce que nous sommes et devons être, penser, croire, craindre, espérer."

Bien évidemment, Annie Ernaux ignorera jusqu'au terme de son temps à elle qu'un petit frère, son cadet, s'est reconnu dans ce cheminement dans le temps. Le Lecteur, son Lecteur. Qui a emprunté les mêmes chemins que son aînée, la mémoire gavée des mêmes images, des mêmes bruits, des mêmes rumeurs. Qui a traversé cette seconde moitié du siècle passé sur un mode identique à celui de l'Auteure, à quelques nuances près. Donc le Lecteur ne peut se montrer objectif. Il transcrit, à la va comme je te pousse, sa passion pour cette oeuvre hors normes. Il avoue son regret de n'avoir pas écrit, Lui, le Livre qui aurait pu être le jumeau de Celui qui le laisse tout transi, vers lequel il reviendra. Puisque il s'agit bien de "sauver quelque chose du temps où l'on ne sera plus jamais".

12 mars 2009

 

 

FARGUES Nicolas : "Le roman de l'été" (P.O.L.). Il serait imprudent de trop tarder à lire ce roman. Qui se définit comme oeuvre de saison. Mais qui, surtout, use de référents dont il sera sans aucun doute difficile de se souvenir dans deux ou trois ans. Ceci précisé, le Lecteur ose prétendre qu'il a savouré sans aucune retenue un tableau à la fois drôle, cruel et pertinent d'une société française qui additionne ses identités plus qu'elle ne les amalgame. Quelques portraits au vitriol de personnages dont les identités réelles transparaissent derrière la caricature apportent la touche de piment qui rehausse le goût de la satyre.

18 décembre 2009

 

 

 

FORD Richard : "L'état des lieux" (L'Olivier). Franck Bascombe (héros récurent de Ford) dilue son cancer de la prostate dans du bourbon. L'Amérique se reflète parfois dans son regard. Le Lecteur est allé jusqu'au terme de la dilution sans enthousiasme, comme résigné à subir l'immanquable happy end qui ne sera évidemment pas révélé ici.

29 mai 2009

 

 

GARNIER Pascal :  "Lune captive dans un oeil mort" (Zulma). Le Lecteur n'ira pas par quatre chemins: voilà un roman qui se laisse savourer. L'histoire des quelques retraités séduits par un de ces projets immobiliers qui proposent l'internement à l'abri des autres. Au soleil, bien évidemment. Drôle. Incisif. Cruel. Une sorte de conte "abracabradantesque". Y compris jusqu'à l'instant du brasier.

15 septembre 2009

 

 

GAVALDA Anna : "La consolante" (Le Dilettante). Le Lecteur a laissé son mouchoir dans sa poche. Pas le moindre flux lacrymal. L'indifférence. Adossée à une irritation générée par une écriture par moment infantilisante. Le produit s'est bien vendu? Les épiciers s'y connaissent dans l'art de faire prendre les vessies pour des lanternes.

4 octobre 2009

 

 

GEIGER Arno : "Tout va bien" (Gallimard). Ou presque. L'histoire d'une famille autrichienne, de 1938 à la première année de ce nouveau siècle. Le Lecteur s'est laissé porter par un récit qui parcourt l'Histoire à travers des chemins détournés. Entre ceux qui s'essayèrent à se tenir à l'écart du nazisme, ceux qui se laissèrent emporter par l'effroyable machinerie. Avec celles et ceux qui en assumèrent l'héritage, qui s'efforcèrent de s'inventer un nouvel horizon. En la compagnie de celles et ceux qui, dans le monde d'aujourd'hui, effacent de leur mémoire le souvenir des sombres années que traversèrent leurs aînés. Ce roman-là constitue une heureuse et passionnante découverte.

27 mars 2009

 

 

GERMAIN Sylvie : "Hors champ" (Albin Michel). Comme un prolongement au conte fantastique de von Chamisso ("Peter Schlemilh"). L'histoire de l'homme qui va finir par tout perdre, jusqu'à son ombre, jusqu'à ses apparences. Si le roman a parfois amusé le Lecteur, il ne l'a jamais vraiment convaincu.

18 décembre 2009

 

 

 

GIORDANO Paolo : "La solitude des nombres premiers" (Seuil). Le roman s'ouvre sur un mélodrame des plus classiques. Il met en scène deux personnages. La petite fille mal aimée. Le petit garçon surdoué et sa soeur jumelle trisomique. Puis, cahin plus que caha, le récit s'élance. Un exercice d'équilibrisme avec, pour toile de fond, la relation entre ces deux êtres. Un quart de siècle. Avec pour interrogation majeure la solitude. Ou, plus exactement, les deux solitudes qui s'effleurent plus qu'elles ne se télescopent. Le Lecteur s'est laissé séduire par le charme arachnéen du roman. Mais il ne s'est guère nourri de sa substance.

11 décembre 2009

 

 

 

GOBY Valentine : "Qui touche à mon corps je le tue" (Gallimard). L'avortable. L'avorteuse. Le bourreau. Aux frontières de la vie et de la mort. Trois destinées qui se conjuguent. Dans un récit qui porte les stigmates de la tragédie classique. Le Lecteur s'est laissé submerger, non point par l'émotion, mais par cette fureur contenue qui transparaît derrière chaque phrase. Ce qu'il advient de chacune des deux femmes en un temps si dissemblable et pourtant si ressemblant à celui d'aujourd'hui. Le roman de Valentine Goby agit comme un révélateur, sans jamais suggérer qu'il serait, quelque part, la moindre rédemption. Il s'agit là d'une oeuvre originale, d'une oeuvre singulière, à la marge des modèles dominants.

28 avril 2009

 

 

GOFFETTE Guy : « L’autre Verlaine » (Gallimard). Pieux ouvrage idôlatrique destiné à celles et ceux qui souhaiteraient connaître les conditions déplorables dans lesquelles s’acheva l’existence de Paul Verlaine, submergé sous la lie résiduelle d’un vin de messe impropre à la consommation.

10 août 2009

 

 

HADDAD Hubert : "Palestine" (Zulma). L'immense, l'effroyable tragédie du Moyen Orient. Que Hubert Haddad met en scène à travers deux personnage issus de chacun des deux camps. Un militaire qui, au lendemain d'une blessure, perd la totalité de ses repères (y compris son identité). Une jeune étudiante anorexique qui vécut la mort de son père abattu lors d'une embuscade. Le roman narre sans complaisance les horreurs de la guerre. Mais l'écrivain use, voire même abuse, dans la mise en scène des relations entre les deux personnages d'un certain angélisme. Un angélisme dont le Lecteur s'est méfié dès les premiers signaux de son émergence. Le conflit n'a-t-il pas dépassé, et depuis fort longtemps, le seuil du non retour? Le Lecteur n'a évidemment pas de réponse à cette question. Mais il a eu le sentiment que Hubert Haddad tentait de lui forcer la main.

11 décembre 2009

 

 

HARRISON Jim : "Une odyssée américaine" (Flammarion). N'en déplaise aux esprits chagrins, voilà un roman vers lequel le Lecteur éprouve déjà le désir de revenir. Sans doute s'est-il senti très proche de l'auteur dans les pages consacrées à ces pulsions qu'un sexagênant se devrait de contenir. Mais là n'est pas l'essentiel. Le Lecteur a suivi Jim Harrison lors de chacun des périples qui devaient conduire l'écrivain à visiter tous les états qu'unissent entre eux une identique vision du rêve américain. Il s'est pris au jeu. Il a semé sur sa route, lui aussi, les représentations des états visités. Il s'est réjoui que le voyage n'atteigne pas à son terme. Il s'est trouvé une toute petite place, tout près du chalet délabré où le narrateur (ancien enseignant reconverti dans l'agriculture et l'élevage) décide de s'installer. Le chalet de l'aïeul de cet homme-là. Dans le Montana qu'il connaît, le Lecteur, grâce aux précédents romans de l'écrivain américain. Le spectacle de l'Amérique de Jim Harrison l'a rassuré. Une Amérique certes incomplète, une Amérique inachevée, mais consciente de la relativité de sa puissance et de son hégémonie. Une Amérique qui s'observe sans aucune complaisance. Une Amérique de femmes et d'hommes somme toute guère différente de la France dans laquelle il survit. Voilà bien un roman revigorant pour ce Lecteur qui s'interroge sur la relativité du temps qui lui est concédé!

"... Vous avez devant vous un fervent partisan de l'égalité! Il est bien difficile de s'occuper de cinq porcelets sevrés, car tous jusqu'au dernier, hormis l'inévitable avorton, vont essayer d'avoir davantage que leur part de nourriture. Un comportement apparemment inscrit dans leur nature non démocratique. Selon le Dr A, nous devrions creuser une énorme auge à cochons dans la grande salle du Congrès américain. Il a même écrit une lettre au journal local pour défendre ce point de vue -et ensuite perdu les deux tiers de sa clientèle républicaine. La dernière fidèle était l'arrière-petite-fille d'un nabab du bois qui en était venue à mépriser tous les politiciens. Le premier Bush lui avait bien plu, mais elle trouvait que Junior était "un poltron". Lorsqu'elle avait fait cette déclaration au bureau de poste, un instituteur d'une école voisine s'était demandé ce que signifiait le mot poltron."

20 avril 2009

 

 

 HARRISON Jim : "La femme aux lucioles" (10/18). Encore des retrouvailles. Le Lecteur, vous l'avez compris depuis belle lurette, est un familier du romancier américain. En reprenant cet ouvrage, il se confronta à ses souvenirs. Sans jamais avoir souffert du moindre désagrément. Sans que jamais ne l'ait tourmenté l'idée d'avoir été, sous une forme ou sous une autre, abusé lors de sa première rencontre. Chacun des trois récits lui était pourtant familier. Mais cette familiarité n'a généré ni l'ennui ni la morisité. Au contraire! Elle a titillé sa curiosité et conféré le désir de prolonger la découverte, d'aller un peu plus loin dans l'exploration.

15 septembre 2009

 

 

HOCHET Stéphanie: « Combat de l’amour et de la faim » (Fayard). Un roman plutôt bien agencé, plutôt bien écrit, que le Lecteur a ingéré d'une seule traite. L'histoire d'un jeune américain, au tout début du siècle dernier (celui du Lecteur, bien entendu!). Ses errances, dans le sud des USA,, de ville en ville, de femme en femme. Les pécules qu'il récupère puis dilapide. Le Lecteur s'est laissé prendre au(x) jeu(x). Mais quant à établir un lien entre ce livre et certaines des oeuvres de Steinbeck ou de Fante (comme cela s'est écrit sur la 4 ° de couverture), mieux vaut en sourire, voire même éclater de rire!

13 novembre 2009

 

 

HOMES A.M. ; "Ce livre va vous sauver la vie" (Actes Sud). Celle du Lecteur poursuit normalement son cours. Il ne lui reste qu'à enfouir ce roman dans les recoins les moins fréquentables de sa mémoire.

4 octobre 2009

 

 

HUIDOBRO Norma : "Le lieu perdu" (Liana Levi). Un village perdu, loin de Buenos Aires. Un village où un flic s'essaie à retrouver la trace d'un subversif. Un village où ce flic s'acharne afin d'obtenir qu'une énigmatique jeune femme veuille bien lui remettre des courriers. Des courriers que la compagne du subversif adressait à cette jeune femme, son amie. Ce roman allégorique, sans jamais y faire référence, évoque les années noires de la dictature argentine. Le chasseur solitaire. Dont la proie ne se résigne pas. Une atmosphère lourde, étouffante. Au coeur de laquelle le chasseur perd, peu à peu, ses repères.

28 avril 2009

 

 

HUMBERT Fabrice : "L'origine de la violence" de Fabrice HUMBERT (Le Passage). Non, il ne s'agit pas d'une quelconque thèse concoctée par un psychosociologue lacanisable (quoique gavé de résidus freudiens). Le Lecteur vous entend récréminer: "Ca commence mal, très mal!". Mais c'est que le Lecteur, lui, se dépêtre comme il le peut du profond malaise qui l'habite encore quelques heures après avoir refermé ce livre. Un roman, pour ne rien vous cacher. Un de ces trop rares romans dont le Lecteur sait qu'il n'en restera pas là, qu'il relira, au gré de ses humeurs (fort fantasques!) quelques pages, voire même la totalité de l'ouvrage. Tant son sentiment s'affirme: il est rare, il est même exceptionnel d'aborder à de la vraie, de la grande littérature. Les grincheux, les branlotteurs de mouches exhumeront peut-être des 315 pages quelques nonchalances. Grand bien leur fasse! "L'origine de la violence" ne présente qu'un seul défaut: avoir été édité par un "petit" éditeur (qui, par ailleurs, est un très grand monsieur... ou une grande dame?)

Voilà donc un narrateur, professeur de son état, qui lors d'un périple scolaire en Teutonnie découvre Buchenwald. Et qu'il se confronte, à l'intérieur du musée, à une photo dont l'un des personnages ressemble étrangement à son propre père. Débute alors une enquête dont je ne révélerai ici pas le moindre détail. Toute la force du roman de Fabrice Humbert, tout son talent consistent à amalgamer l'effroyable histoire de la barbarie nazie aux destinées de quelques personnages, dont une lignée de nobles et vertueux serviteurs de l'Etat français (à tous les moments de l'histoire). Une famille engluée dans ses non-dits, ses secrets, ses mensonges, avec sa madame Bovary (le Lecteur s'autorise la référence, puisque l'Auteur y a recours).

("Parfois je me demande dans quelle mesure mes références littéraires ne sont pas le masque opaque de mes émotions, canalisant et détournant, fixant mes visions vers ces êtres de papier que sont les écrivains et leurs personnages.")

Fabrice Humbert amalgame, malaxe, pétrit ces existences jusqu'au point de contraindre le Lecteur à se regarder dans un  miroir et à s'interroger: "Quelle part de barbarie sommeille en moi?"

Merci, Monsieur Humbert.

10 juin 2009

 

 

HUSTVED Siri : "Elégie pour un américain" (Actes Sud). Ou, plus exactement, "élégie du père". Dont les deux enfants explorent les mémoires que cet homme leur a laissé en héritage. Le Lecteur a pris un évident plaisir a découvrir les modes d'intégration d'une famille d'immigrants venus de Norvège et qui se façonne ses espaces (ainsi qu'une identité) dans l'Amérique d'hier. Par contre, la surabondance des références psychanalytiques l'ont trop souvent exaspéré (plus qu'ennuyé). Mais il y a tant de générosité et d'humanité chez Siri Hustved que l'exaspération du Lecteur fut assez aisément contenue.

10 juin 2009

 

 

IWEALA Uzodinma : "Bêtes sans patrie" (L'Olivier). Clamer son enthousiasme au terme d'une lecture haletante de ce roman superbement traduit par Alain Mabanckou?Ou, au contraire, laisser entrevoir son incrédulité devant l'aisance avec laquelle l'écrivain s'insinue dans la peau d'un enfant-soldat africain? Avec toutes les réticences que cette aisance implique. Le Lecteur, vous l'avez compris, reste partagé au moment où il rédige cette note. Peut-être reviendra-t-il vers ce roman qui l'a dérangé mais qui n'a pas généré les cris d'indignation que le sujet laissait supposer.

29 mai 2009

 

 

JOHNSON Denis : "Arbre de fumée" de Denis (Bourgois). Roman hollywoodien pour lequel l'éditeur a cependant le (grand) tort d'évoquer, dans sa succincte présentation, les oeuvres de Cimino ou de Coppola. Il n'est en effet pas évident de faire tout un cinéma autour de l'antépénultième évocation de la guerre du Viet-Nam. En dépit de quelques pages "flamboyantes".

25 février 2009

 

 

KRALL Hanna : "Le roi de coeur" (Gallimard) Roman sur la Shoah? Plus que cela sans doute. Même si le ghetto de Varsovie, son insurrection, même si les camps de la mort sont omniprésents dans cette oeuvre-là.Car il s'agit de la quête désespérée d'une femme. Une longue errance dans l'Europe en guerre, à la recherche de l'homme aimé, de l'homme interné par les nazis. Sobre, dépouillé, ce roman évite les pièges du pathos. Il entraîne le Lecteur sur les traces de celle qui ne renonce pas, cette femme qui chemine jusqu'au terme de sa quête.

8 avril 2009

 

 

LACLAVETINE Jean-Marie : "Nous voilà"  (Gallimard). Quelques fachos, pilotés par un célèbre avocat, s'emparent, en 1973, du cercueil (et de la dépouille afférente) du vieux maréchal. Direction Douaumont. Sauf que l'odyssée ne se déroule pas son les voeux de l'instigateur de l'opération. La route des ravisseurs croise, en plein coeur de Paris, celle de manifestants venus du Larzac et interfère avec deux électrons libres qui survivent à la marge des mouvements post soixanthuitards. L'épopée ne constitue qu'un alibi à Jean-Marie Laclavetine pour dresser des portraits au vitriol de quelques uns des acteurs majeurs de ces mouvements-là. Sans cracher dans la soupe. Sans caricaturer. Sans donner des gages à Celui qui prétend clore définitivement le grand livre des utopies avortées. Ce dont le Lecteur lui sait gré. Qui applaudit, lui, le Lecteur à cette sorte d'allégorie: le cercueil (et ce qu'il reste de la charogne du vieux maréchal) emporté par la Seine, vingt cinq ans après le rapt, vers une destinée peu glorieuse. Comme une sorte de naufrage de la collaboration ou, plus précisément, des collaborations qui scandent, selon des modalités évidemment différentes, les phases principales de l'histoire de France. Voilà donc un roman que le Lecteur a pleinement savouré, dont il s'est délecté, dont il a apprécié les petites pointes poivrées et pimentées.

Dans ce tableau, par exemple, d'un grand raout qui réunit autour de "jeunes" mariés les élites de la nation: "Ils vont rater les viandes, les desserts, les rumbas, ne verront pas l'ex-candidate socialiste tenter une danse du ventre sous l'oeil attendri de quelques adhérents du Medef, ni tel ministre de droite, par ailleurs ancien mao, entreprendre un sirtaki endiablé en tenant par l'épaule le directeur d'une chaîne de télévision commerciale, ni le maire de Bordeaux se lancer dans un slam décoiffant, ils n'assisteront pas à l'aimable déchaînement festif qui connaîtra son comble vers une heure du matin, moment des confidences émues, des retrouvailles sincères, des plans sur la comète, des promesses solennelles et légèrement titubantes..."

Maréchal, les voilà! Et ça n'a rien de ragoûtant. Heureusement pour eux; les coeurs purs continuent à se tenir à la marge et à déserter les festins!

3 novembre 2009

 

 

LANGE-MULLER Katja : "Vilains moutons" de (Laurence Teeper). Un roman d'une noirceur infinie. Une histoire d'amour à cheval sur deux Allemagne, en équilbre instable sur un mur. Deux perdus, deux égarés qui additionnent leurs souffrances. Deux perdus, deux égarés qui ne recherchent même pas une quelconque rédemption.Qui survivent à Berlin, arrimés l'un à l'autre lorsque les circonstances les y autorisent. Mais cette noirceur est traversée par la fulgurance d'éclairs qui laissent entrevoir des possibles. Je m'émerveille de la rencontre avec une écrivaine allemande qui, jusqu'à ce jour, m'était totalement inconnue.

6 mars 2009

 

 

LEGENDRE Claire : "L'écorchée vive" (Grasset). Rien à voir avec une quelconque boucherie. Non. L'épicerie Grassouillette et Flasquelle a publié avec ce roman une oeuvrette à l'eau de rose. Une sorte d'harlequinerie.

11 décembre 2009

 

 

 

LEIGH Julia : « Ailleurs » (Bourgois). Le Lecteur se situait ailleurs. Tellement ailleurs qu’il n’a fait que survoler ce roman. Ce qui lui sera peut-être dommageable. Mais qui relève du superflu au moment où il rédige ces quelques notes.

10 août 2009

 

 

LENOIR Hélène : "La folie Silaz" (Minuit). Des obsèques. Une famille déchirée. Ce roman se laisse lire. Il est même possible de l'apprécier. Mais la folie n'y est point débordante.

25 février 2009

 

 

 

LEPRONT Catherine :  "Disparition d'un chien" de Catherine(Seuil). Avant que solliciter le soutien des éditions du Seuil, Catherine Lépront aurait peut-être dû interroger le refuge de la SPA le plus proche de son domicile.

19 janvier 2009

 

 

LESBRE Michèle : "Sur le sable" (Sabine Wespieser). Roman habité par l'oeuvre de Modiano. Reste tout de même à trouver où se cachent "les êtres mystérieux" dans les 150 pages qui, pour l'essentiel, retracent la rencontre nocturne d'une femme et d'un homme. Une plage. L'océan. L'incendie d'une maison. Les confidences. Le Lecteur n'a certes pas eu le temps de s'ennuyer. Mais il ne s'est jamais vraiment senti concerné.

11 décembre 2009

 

 

 

LOY Rosetta : "La première main" (Mercure de France). Ce livre se situe à la périphérie de l'oeuvre de Rosetta Loy. Une commande de l'éditeur français pour une collection que dirige Colette Fellous, "Traits et portraits". Reste que l'exceptionnel talent de la romancière italienne confère à l'exercice de l'autobiographie une vraie dimension romanesque. L'art de l'écriture colle comme une seconde nature à cette grande dame là. De l'élégance, une infinie délicatesse, et cette pudeur qui retient la main, qui évite les surabondances. Une enfance italienne, qui parcourt les années noires du fascisme jusqu'à l'irruption dans Rome des soldats américains. L'avancée vers l'autre temps, celui de la libération, les jalons d'une exceptionnelle vie de femme. Que Rosetta Loy rapproche et réunit dans ces quelques lignes bouleversantes: "Et pendant que ces microdivinités marines agitent à peine leur corps qui n'en est pas un, dans un bout de mer qui n'est qu'un pan minuscule de silence dans le grand tohu-bohu du littoral, tout à coup mon mal d'enfance et de vieillesse, un mal qui s'empare des deux extrémités pour les tordre ensemble, lâche prise. Comme une noix, il se casse en deux: à César ce qui est à César, à Dieu ce qui est à Dieu." Rosetta Loy est de celles et ceux qui symbolisent cette Italie dont je ne cesse de me sentir si proche.

27 mars 2009

 

 

MABANCKOU Alain : "Black Bazar" (Seuil). L'humour ne fait point défaut à ce roman d'un auteur africain déjà apprécié. Bien au contraire. Mais pourquoi donc le Lecteur a-t-il ressenti comme de la complaisance dans un propos pourtant si proche de sa vision et des questions de l'immigration et de celles dc l'histoire du colonialisme? Roman bâclé? Ou roman dans l'urgence? Le Lecteur avoue sa perplexité.

9 août 2009

 

 

MANKELL Henning : « Le cerveau de Kennedy » (Seuil). Un polar à la mode scandinave? Peut-être? Le Lecteur est trop ignorant de cette mode pour exprimer ici une opinion. Mais ce récit si dense, si âpre, sur la quête d'une mère qui cherche à comprendre les causes de la mort de son fils unique, ce récit l'a bouleversé. En raison de la trame dramatique, bien évidemment. Mais plus encore dans la véhémence contenue dont use Henning Mankell pour dénoncer la brutalité et le cynisme des occidentaux dans leurs relations avec l'Afrique. Avec, en toile de fond, mais si omniprésent, le Sida. Et ces prétendues politiques "humanitaires" qui ont aidé à fabriquer, entre autres, la légende d'un individu désormais vendu à la cause sarkozyste. Pour le reste, et puisqu'il s'agit d'un polar, rien d'autre, une fois encore, ne sera dévoilé ici.

23 novembre 2009

 

 

MASPERO François : "Des saisons au bord de la mer" (Seuil). Encore une fois le fruit du hasard. Qui rapproche, aux yeux du Lecteur, François Maspero et Rosetta Loy. Puisque l'ancien éditeur, aujourd'hui romancier et traducteur, évoque son enfance et les séjours chez ses aïeux sur les rivages de la mer du Nord, avant de l'entraîner, Lui, le Lecteur dans la découverte d'une autre enfance, celle d'une petite fille, la fille du narrateur. Sauf que l'exercice ne relève pas, ici, de l'autobiographie. Mais d'une sorte d'amalgame entre l'histoire vécue et l'histoire inventée. Ce livre-là est bouleversant de sincérité, empreint d'une grande pudeur, façonné à la mode des artisans qui s'astreignent à rendre un travail bien fait. Ce livre-là tient du prodige. François Maspero est un honnête homme, une de ces exceptions auxquelles le Lecteur tient à rendre un vibrant hommage. Pour cette vie singulière, celle du journaliste qui dénonça avec tant de véhémence la guerre infâme que les armées françaises menèrent en Algérie, celle de l'éditeur qui durant près de vingt ans permit à la Pensée de ne pas s'engluer dans les conformismes, celle du traducteur de quelques-uns des plus importants écrivains espagnols et italiens. Cette vie-là occupe une place modeste dans "Des saisons au bord de la mer". Puisque François Maspero est un modeste. Mais ce qu'il confie au Lecteur, ces enfances qu'il conjugue plus qu'il ne les juxtapose, cette merveilleuse offrande ne peut, ne doit pas être confinée dans l'anonymat.

27 mars 2009

 

 

MAUVIGNIER Laurent : « Des Hommes » (Editions de Minuit). Voilà plus d'un demi-siècle que la guerre d'Algérie hante le Lecteur. Lui qui n'y fut pas convié puisque sursitaire. Non en raison de quelque soutien occulte. Mais l'Etat le formatait alors pour d'autres fonctions. Donc cette putain de guerre. Autant l'écrire tout de suite: c'est la seconde partie du roman de Laurent Mauvignier qui l'a concerné, le Lecteur. L'immersion dans l'abomination, puisque toute guerre est une abomination, puisque chaque guerre dégrade ou détruit chacun de ceux qui en sont des acteurs. "... tu sais, on pleure dans la nuit parce qu'un jour on est marqué à vie par des images tellement atroces qu'on ne sait pas se les dire à soi-même."  Laurent Mauvignier restitue, avec beaucoup de pertinence l'étrange, la douloureuse dramaturgie à laquelle durent se soumettre des centaines de milliers de jeunes français. Des garçons qui en ces années-là (1954/1962) n'étaient que les aînés du Lecteur, les "grands" qu'il avait fréquentés à l'école primaire et que la République expédiait, via Marseille, sur cette terre qui, de toute évidence, n'était pas le France. Ce que l'écrivain rappelle sans jamais user (ou abuser?) de démonstrations alambiquées.

Le grand mérite de Laurent Mauvignier consiste à mettre l'accent sur l'immense gâchis qu'engendra cette saloperie de guerre. Au-delà de l'amoncellement des cadavres. Les survivants, parce qu'ils furent immergés dans l'abomination, n'en sont pas revenus intacts. A travers ses quelques personnages, l'écrivain exhibe les souffrances enfouies, les cicatrices jamais refermées. Voici donc que vient de paraître une des rares oeuvres littéraires qui tende au(x) Lecteur(s) un miroir sur le ce que nous avons été, victimes et bourreaux, au nom d'un idéal dévoyé.

(Le Lecteur rappelle toutefois le "C'était notre terre" de Mathieu Belezy, oeuvre qui, sous un autre angle, constitue elle-aussi un implacable réquisitoire contre le colonialisme à la française et l'ignominie des guerres qui l'accompagnent!)

Enfin, sans doute est-il heureux que les vieilles badernes du Goncourt n'aient pas décerné leur prix à Laurent Mauvignier. Son roman qui reste libre, désormais, d'évoluer par lui-même, hors de la pression médiatique et de tout ce qu'elle implique comme compromissions.

13/11/09

 

 

 

MAZZANTINI Margaret : "Antenora" (10/18). Une femme italienne. Dont la vie parcourt les heures les plus sombres de l'histoire italienne.Sans qu'elle ait jamais vraiment disposé de la liberté de choisir. Mais qui renaît à l'âge de vieillesse dans sa relation avec sa petite-fille, qui s'évertue à survivre en elle. Trop sombre? Trop mélodramatique? Ce roman a perturbé le Lecteur qui n'en finit pas de s'interroger.

29 mai 2009

 

 

McCann Colum : "Et que le vaste monde poursuive sa course folle" (Belfond). Un curé irlandais à New-York. Défroquable, le curé. Et qui ouvre les portes de son taudis à quelques péripatéticiennes noires. Tandis qu'un funambule se tient en équilibre sur un câble d'acier tendu entre les Twin Towers. Le roman frôle de manière quasi constante le mélo. Mais il ne s'y vautre pas, ou si peu, que le Lecteur s'est, au fil des pages, pris de passion, de tendresse aussi, pour chacun des personnages. Comme entraîné, à l'insu de son plein gré, dans la course folle de ce vaste monde. Qui ne concède que des sursis aux victimes d'un système que McCallum ne nomme jamais mais qu'il décrit sous son jour le plus effroyable: le capitalisme.

2 décembre 2009

 

 

 

McCARTHY Cormac : "La route" (L'Olivier). Le roman de la fin du monde. Dont l'Auteur prend bien soin de ne pas préciser le pourquoi. L'Apocalypse, au sens biblique. Quelques survivants. Tels des ombres diaphanes, sensés appartenir à deux entités distinctes: les gentils et les méchants. Sans que les frontières soient clairement établies entre ces deux entités. Et puis, le père et le fils qui empruntent la route, en direction du sud et de la mer. Une longue marche. Une marche douloureuse, une marche désespérée au milieu des ruines de l'ancien monde. Jusqu'au terme, qui laisse entrouverte une perspective d'espoir. Un espoir ténu. Confronté au constat que rien ne sera plus jamais comme avant.

"Autrefois, il y avait des truites de torrent dans les montagnes. On pouvait les voir immobiles dressées dans le courant couleur d'ambre où les bordures blanches de leurs nageoires ondulaient doucement au fil de l'eau. Elles avaient un parfum de mousse quand on les prenait dans la main. Lisses et musclées et élastiques. Sur leur dos, il y avait des dessins en pointillé qui étaient des cartes du monde en son devenir. Des cartes et des labyrinthes. D'une chose qu'on ne pourrait pas refaire. Ni réparer. Dans les vals profonds qu'elles habitaient toutes les choses étaient plus anciennes que l'homme et leur murmure était de mystère."

21 mars 2009

 

 

McEWAN Ian : « Sur la plage de Chesil » (Gallimard). Une histoire d'amour contrariée, inaboutie qui a pour cadre l'Angleterre du début des années 60. La rencontre d'un historien en devenir et d'une talentueuse violoniste. Pour le Lecteur qui atteignit à l'âge d'homme en ces années-là, McEwan restitue plutôt bien les peurs génératrices des blocages qui entravaient et paralysaient les amours naissantes, qui leur interdisaient d'atteindre à l'accomplissement. Avec, au bout du compte, des blessures qui ne se refermaient jamais. Un roman à contre-courant, puisqu'il induit que la libération sexuelle consécutive au séisme de mai 68 fut plus qu'un bienfait, une nécessité! Une nécessite inaboutie....

22 octobre 2009

 

 

MEEK James : "Nous commençons notre descente" (Métailié). D'Afghanistan en Irak, les tribulations de deux journalistes. Tribulations professionnelles. Tribulations amoureuses. L'homme et la femme confrontés au désir. L'homme et la femme qui témoignent des guerres. Regard aigu d'un écrivain qui maîtrise son sujet, puisque journaliste professionnel. Mais dont le talent va bien au-delà de la seule retranscription. Tant James Meek confère à ses deux personnages une dimension tragique qui englobe les grands questionnements sur les drames de notre temps. Sans complaisance. Sans afféterie. Sans les culculteries qui surabondent dans la Médiatouillerie franchouillarde.

30 janvier 2009

 

 

MICHON Pierre : "Les onze" (Verdier). Le Lecteur n'ira pas par quatre chemins. Non. Droit au but. Ce roman est une merveille. Une merveille d'écriture, ce qui ne surprendra pas celles et ceux qui ont pris l'habitude de fréquenter Michon. Une merveille de "mise en scène": cette histoire d'un tableau commandé au peintre Corentin afin d'immortaliser les principaux acteurs du célèbre (???) Comité de salut public. Alors que la Terreur atteint à son terme. Une oeuvre majeure autour de laquelle se pressent aujourd'hui les visiteurs du Louvre. Michon entremêle, pétrit et refaçonne ce qui appartient à l'Histoire et ce qui relève de la fiction, dans un jeu d'une inouïe subtilité. Ce roman, le Lecteur le certifie (à ses risques et périls), se révèle comme un pur moment de vraie, de grande littérature.

30 juin 2009

 

 

MICHON Pierre : « Vies minuscules » (Gallimard). Relecture du premier Michon (sauf ignorance du Lecteur). Afin de vérifier si certain enthousiasme (voir une précédente chronique)  ne fut pas excessif. Relecture qui confirme que non. "Mais peut-être que Là-Haut les vieux auteurs, les vrais dont toujours on est indigne, et leurs intercesseurs, les benoîts exégètes à barbiches début de siècle, lui disent eux-mêmes leurs textes, d'une plus vive voix que les voix des vivants."

13 novembre 2009

 

 

 

MITCHELL David : "Le fond des forêts" (L'Olivier). Le Lecteur s'exaspère à se confronter à des romans dont le fin du fin consiste à abuser d'une écriture qui reproduit ou imite les tics de langage et le parler des adolescents. La recette lui semble éculée. Reste tout de même que ce roman traite avec parfois beaucoup d'humour des années Thatcher. Des années observées par un adolescent bègue, englué dans les rets d'une famille qui s'évertue surtout à sauver les apparences. Les plus belles pages, aux yeux du Lecteur, sont celles de la rencontre de ce gamin qui s'essaie à la poésie et dialogue avec une dame Crommelynck. Une précision qui, normalement, devrait se passer de tout commentaire!

4 juin 2009

 

 

 

MORAZZONI Marta : « L’invention de la vérité » (Actes Sud). Insensible. Hermétique. Le Lecteur n'a pas ressenti le moindre frisson en découvrant la juxtaposition des deux récits qui évoquent la Tapisserie de Bayeux. (Un argument qui, toutefois, ne saurait justifier l'abandon de l'enseignement de l'histoire pour certains élèves des classes de Terminale.)

28 décembre 2009

 

 

 

 

MORGIEVRE Richard : "Cheval" (Denoël). Le Lecteur gardait un excellent souvenir des quelques romans de Richard Morgièvre qu'il avait lus. Ce "Cheval" ne l'a nullement convaincu.Même abordé au petit trot.  Pour le reste, n'est pas Céline qui veut.

4 octobre 2009

 

 

MORRISON Toni : "Un don" (Bourgois). Un monde primitif. Qui n'est pas encore (et loin s'en faut) l'Amérique. Un monde en gestation. Au sein duquel l'immigrant européen recrée un univers à la ressemblance de ce à quoi ressemblait l'ancien monde. En disposant d'une force de travail arrimée à la glèbe: celle de l'esclave. Dans ce monde bouillonnant, dans ce monde en fusion, dans ce monde d'âpre violence, des consciences s'éveillent, des rêves insensés colorent les nuits de la désespérance. Des voix de femmes entremêlent les récits. Ce roman de la "Prix Nobel" n'a ni étonné ni même surpris le Lecteur: il l'a émerveillé. En dépit des blessures provoquées par les mots qui déchirent. Ou, peut-être, malgré eux.

"Je suis pétrifiée. Tu veux dire que je ne suis rien pour toi? Que je n'ai aucune importance dans ton monde? Mon visage absent dans l'eau bleue, tu ne le trouves que pour l'écraser? A présent, je vis cette mort de l'intérieur. Non. Pas encore. Jamais plus. Les plumes se hérissent, je les déploie. Les serres griffent et griffent encore jusqu'au moment où le marteau se retrouve dans mes mains."

10 août 2009

 

 

MURAKAMI Haruki : « La course au mouton sauvage » (Seuil). Le Lecteur l'admet: ce roman-là se parcourt sans aucun déplaisir. Pris au jeu d'une (en)quête quelque peu fantastique, il est allé de case en case, au gré des volontés ou des fantaisies de l'Auteur. A saute-mouton, en quelque sorte. Afin de comprendre pourquoi le vieux facho milliardaire crevait d'un cancer pour cause de désertion d'un ovin. Alerte, drôle, hilarant parfois, le roman n'est toutefois pas, aux yeux du Lecteur, l'oeuvre géniale que deux ou trois Idolâtres lui avaient recommandée.

23 novembre 2009

 

 

NDIAYE Marie : "Trois femmes puissantes" (Gallimard). C'est le regard circonspect et l'esprit en éveil que le Lecteur s'est insinué dans ce roman. Un roman consacré par de vieilles badernes, une sorte d'onction qui, d'ordinaire, le rend méfiant, lui, le Lecteur, pusillanime, vindicatif parfois. Au terme de son cheminement, non seulement il admet que l'oeuvre vaut beaucoup plus qu'un détour de circonstance, mais qu'elle se situe à un niveau qui lui confirme que Marie NDiaye est bien une des auteures majeures de la littérature française contemporaine (en dépit de ses réticences à l'égard de la première gallimardise de l'exilée berlinoise).

Les destinées croisées des "Trois femmes puissantes" (ces destinées que relient deux si fragiles passerelles)s'amalgament dans un récit dont la dramaturgie monte en puissance au fil des pages. Trois victimes, certes, mais qui, chacune à sa façon, se tiennent droit debout et résistent, comme elles le peuvent, aux courants tumultueux qui cherchent à les entraîner au plus profond des abîmes. Trois victimes dont la puissance résulte du refus de se résigner, de la volonté de ne pas laisser s'accomplir ces destinées sans avoir mené, jusqu'au bout, le combat pour le droit à la dignité, pour la conquête du pouvoir à déterminer les espaces de la, de leur liberté. Ce roman se construit autour de pages somptueuses, dont le Lecteur éprouve, après avoir refermé le livre, après avoir humé une fois encore son odeur, la nécessité, l'urgent besoin d'y effectuer de nouvelles immersions. Plus apaisées, sans doute, que la toute première, mais plus foisonnantes, plus riches de sensations nouvelles. Ce dont Il ne doute pas un seul instant.

2 décembre 2009

 

 

 

OATES Joyce Carol : "La fille du fossoyeur" (Philippe Rey). Le Lecteur ne fut point dupe: ce roman-là n'atteint pas au niveau de quelques autres de ceux qui jalonnent l'oeuvre foisonnante de Joyce Carol Oates. Qu'importe, au fond! Puisque celui-ci relate la vie d'une femme née dans le port de New-York, dans l'antre d'un navire où s'entassaient des familles juives et allemandes fuyant la nazisme. Une femme qui va tenter de donner consistance à son rêve américain. Mais qui, dans le même temps, s'évertuera à ne pas laisser dépérir ces racines. Et qui, au crépuscule de sa vie, la conduira à tenter de nouer des liens avec une universitaire dans laquelle elle croit reconnaître la cousine dont elle était persuadée qu'elle n'avait jamais atteint à la terre promise. Le Lecteur ne se reniera pas: il voue une profonde admiration à Joyce Carol Oates. Et même si ce roman-ci n'est pas celui dont il gardera le souvenir le plus marquant, il contient l'essentiel de ce qui jalonne toute l'oeuvre de la romancière américaine.

20 avril 2009

 

 

OLLAGNIER Virginie : "L'incertain" (Liana Levi). Le Lecteur ne dissimule pas sa déception. Lui qui est resté à la périphérie de ce roman. Un roman auquel il n'a pas cru un seul instant. Alors qu'il s'était laissé séduire par la première oeuvre de l'auteure ("Toutes ces vies qu'on abandonne"). L'exercice littéraire ne l'a pas convaincu. L'Histoire a bon dos. Elle que Virginie Ollagnier effleure à peine. La vie d'un homme qui émerge avec la Révolution d'octobre et qui atteint à son apogée en mai 68. Si peu convaincant, cet homme-là. Qui aura aimé/désiré trois générations des femmes d'une même lignée. Le Lecteur attend le prochain roman de Véronique Ollagnier. Qu'il s'efforcera de lire sans le moindre parti pris. Lequel, en raison de son émerveillement initial, aura peut-être faussé sa lecture de "L'incertain".

6 mars 2009

 

OSZTOJKAN Bela : "Joska Atyin n'aura personne pour le lui rendre" (Fayard). La vie d'une communauté tsigane dans la Hongrie communiste des années cinquante. Une fable allégorique qui entremêle l'histoire et les légendes que colportait un peuple contraint à vivre aux marges de la société. Tellement marginalisé, ce peuple, qu'il n'avait (n'a?) d'autre solution que de s'inventer un monde. L'art de survivre hors des réalités contraignantes, absurdes, violentes.

20 avril 2009

 

 

OULITSKAÏA Ludmila : "Daniel Stein, interprète" (Gallimard). Texte totalement hermétique à l'entendement du Lecteur, mais salué par la "critique".

22 août 2009

 

 

OZOUF Mona : "Composition française" (Gallimard). Que doit saluer le Lecteur? Les pages superbes que Mona Ozouf a sous-titré: "Retour sur une enfance bretonne"? Ou bien celles au long desquelles l'historienne pose avec beaucoup d'intelligence et de pertinence les questions du devenir d'une république dont les fondements seraient menacés par ce qu'il est convenu d'appeler la "montée des communautarismes"? Le Lecteur s'est laissé gagner par une sorte d'allégresse lorsqu'il a découvert les pages consacrées à l'enfance. Une enfance des années 30. La fille de l'institutrice de l'école publique, dans une région où les écoles confessionnelles prétendaient encore à l'hégémonie. Ces pages-là fourmillent d'anecdotes qui nourrissent, en quelque sorte, la seconde partie de l'ouvrage. Une petite fille plutôt bon élève, évidemment, mais que le cheminement du père décédé conduit à se confronter à la culture que le modèle républicain s'évertue à maintenir dans les oubliettes. Une confrontation qui conduira progressivement Mona Ozouf à s'interdire de se reconnaître ou de s'identifier dans les dogmatismes. Ce qu'elle explique d'une manière que le Lecteur estime convaincante dans le dernier paragraphe de son ouvrage.

"Est-ce en raison de ces habitudes scolaires qu'à la question: qui êtes-vous, nous ne sachions répondre qu'en racontant une histoire, la nôtre? Cette histoire, nous disent les communautaristes, est faite de notre appartenance à la communauté. A quoi les universalistes répondent qu'elle n'a rien à voir avec l'appartenance. Je ne crois ni les uns ni les autres. Ni les universalistes, parce que notre vie est tissée d'appartenances. Ni les communautaristes, parce qu'elle ne s'y résume pas. Après tout, c'est l'individu qui tient la plume et se fait le narrateur de sa vie; le narrateur, c'est-à-dire l'ordonnateur, l'arrangeur, l'interprète. Or, la narration est libératrice. C'est elle qui fait de la voix "presque mienne" d'une tradition reçue la voix vraiment mienne d'une tradition choisie. Elle qui dessine l'identité, mais sans jamais céder à l'identitaire car le parcours biographique corrige, nuance, complique à l'infini la vision absolutisée des identités."

Voilà. L'ouvrage de Mona Ozouf s'éclaire pour qui voudra bien prendre le temps de le découvrir. Le Lecteur, quant à lui, au fil de son errance, ne s'est peut-être pas défait de quelques unes de ses certitudes mais, de toute évidence, il s'est confronté à des contradictions, les siennes, qu'il persévérait, jusque là, à refouler. Si, par exemple, il n'endossera pas la burka (et ne la fera endosser à aucune de ses nombreuses maîtresses), il comprend mieux le pourquoi de ses réticences à ne serait-ce qu'accompagner la croisade que vient de lancer le bolchevique Gérin.

30 juin 2009

 

 

PAASIILINNA Arto : « Les dix femmes de l’industriel Rauno Rämekorpi » (Denoël). Décevant. Malgré quelques trop rares moments de franche rigolade. L'histoire de ce parvenu, riche industriel, acoquiné à dix femmes sensées représentées toutes les couches sociales finlandaises marque comme un essoufflement chez un écrivain dont le Lecteur avait maintes fois vanté le talent. Une erreur de parcours? Ou une fin de parcours? Cela ne devrait plus tarder à se vérifier, l'écrivain finlandais étant particulièrement prolixe.

3 novembre 2009

 

 

PADILLA Ignacio : « Spirale de l’artillerie » (Gallimard). L'ultime phase de la décomposition du système soviétique vue de très loin (de trop loin?) par un écrivain mexicain. Ultime phase romancée à la va comme je te pousse.

23 novembre 2009

 

 

 

PERCY Benjamin : "Sous la bannière étoilée" (Albin Michel) Les grincheux rétorqueront au Lecteur que les dix nouvelles de ce recueil n'atteignent pas toutes à de vertigineux sommets. Ce qui est sans doute vrai. Mais elles traduisent toutes un profond mal vivre et d'infinies souffrances: celui et celles d'hommes et de femmes enclos dans des territoires d'une Amérique inaccomplie. Les séquelles des guerres (Viet-Nam, Irak), les angoisses face à un devenir incertain. La vie du "petit" peuple, des "braves" gens. Comment ne pas se ressentir en symbiose avec ces textes ciselés, comme épurés, qui reflètent tant de ces interrogations proches de celles qui s'expriment de l'autre côté de l'Atlantique. La rencontre avec Benjamin Percy est de celles qui permettent au Lecteur de croire qu'il reste un avenir pour la littérature.

4 octobre 2009

 

 

PLUYETTE Patrice : "La traversée du Mozambique par temps calme" (Seuil). Un vrai faux roman d'aventure(s). Insipide. Sans saveur. Même pas drôle. Telles sont du moins les conclusions qui s'imposent au Lecteur au terme d'un parcours au long duquel il n'a nullement souffert du mal de mer.

8 avril 2009

 

 

PREVOST Jean : « Le sel sur la plaie » (Zulma). Zulma a eu la bonne idée de rééditer un auteur mort au combat dans le maquis du Vercors le 1 août 1944. Avec ce roman des années trente qui narre la prodigieuse ascension sociale d'un arriviste, une sorte de Rastignac, Sauf que lui choisit la province plutôt que Paris. Qui crée une entreprise de presse (aujourd'hui, on dirait plutôt de "communication") pour mieux atteindre aux périphéries du pouvoir d'alors: la députation. L'oeuvre est bien évidemment datée. Mais elle laisse entrevoir les comportements des Rastignac d'aujourd'hui qui ne sont jamais que des copies-conformes de leurs aînés.

 

 

PYNCHON Thomas ; "Contre-jour" (Seuil). Le type même de littérature au sein de laquelle le Lecteur est incapable de survivre. Même en usant de tous les artifices.

8 mai 2009

 

 

QUINRY Bernard : "Contes carnivores" (Seuil). C'est le genre de bouquin qui échut par hasard au Lecteur, un matin qu'il emplettait dans les rues désertifiables de Palavas. Du haut de son balcon, Juliette l'interpella en brandissant un objet qui avait les apparences d'un livre. "Veux-tu de cette chose qui m'ennuie et me désespère?" Confus et rougissant, le Lecteur qui n'est point Roméo acquiesça. Voilà comment Il hérita de ce Bernard Quiriny dont Juliette, avenante et talentueuse comédienne, ne voulait plus. Un héritage qui lui procura d'infinis plaisirs (qui sont tout le contraire des menus plaisirs!). Car il ne fut pas une seule des nouvelles publiées dans cet ouvrage qui l'ait laissé indifférent. Lisant cet auteur belgien, Il fut certes maintes fois tenté par le jeu des ressemblances, voire même par celui des assimilations. Poe. Queneau. Pérec. Magrite. Mais il ressort de ces nouvelles un talent qui est étranger à la copie ou à l'imitation. Un talent original dans le domaine si particulier qui s'établit aux frontières du fantastique et du surréalisme.

2 décembre 2009

 

 

RAMSLAND Morten : "Tête de chien" (Gallimard). Voilà bel et bien un grand roman. Ancré dans la tradition littéraire scandinave. L'histoire d'une famille installée à cheval sur la Norvège et le Danemark. De l'avant guerre (la seconde) jusqu'à nos jours. Quatre générations qui se confrontent, qui s'affrontent, qui enfouissent leurs secrets puis tentent de les exhumer. Il y a du Bergman dans ce roman, quelque chose de sombre, avec toutes les souffrances sous-jacentes, sous le regard des enfants, dans l'accumulation des déchirures. Mais avec des moments de respiration, de légèreté, d'humour. A ne surtout pas négliger.

12 février 2009

 

 

RHEIMS Nathalie : "Le chemin des sortilèges" de Nathalie (Léo Scheer). Pardon? Pas la moindre référence à Bruno Bettelheim, à sa "Psychanalyse des contes de fées"? Superflue, sans aucun doute. Puisque l'auteure fut accompagnée, dès son plus jeune âge, d'une multitude de bonnes fées, toutes plus cossues les unes que les autres.

9 janvier 2009

 

 

 

RIVAS Manuel : "L'éclat dans l'abîme" (Gallimard). Le Lecteur l'affirme sans ambages: ce roman d'un écrivain espagnol aborde à ce que fut la guerre civile avec une force hors du commun. Extrêmement dense. Touffu. Voire même impénétrable. Mais d'une richesse incommensurable. Trop peut-être? Le Lecteur s'interroge. Tant il lui paraît qu'il a négligé ou même ignoré trop de choses et que cherchant souvent ses repères il s'est consacré à l'accessoire jusqu'à en perdre de vue l'essentiel. A un point tel qu'il ressent l'urgence de revenir à ce roman, de l'entreprendre à rebours plutôt que de revenir vers les chapitres qui lui furent les plus hermétiques. Mais avec la conscience qu'il vient de rencontrer un éminent personnage de la littérature contemporaine. Un créateur qui dépasse les influences dont il se revendique pour s'inventer un univers particulier, un univers si particulier qu'il installe cet homme-là parmi les plus grands. Car si la guerre d'Espagne et ses conséquences servent de toile de fond, le propos, lui, aborde aux dramaturgies majeures. C'est pourquoi ce roman-là nécessite d'être revisité afin de goûter, sans en perdre une miette, à sa substantifique moelle.

8 avril 2009

 

 

ROLIN Jean : "Un chien mort après lui" (P.O.L.). Le Lecteur fut un compagnon de voyage plus que discret: transparent. Ce qui ne signifie nullement qu'il n'a pas apprécié cette sorte d'errance planétaire d'un écrivain lancé à la recherche des meutes de chiens sauvages qui offrent comme un reflet troublant de ce que deviennent les sociétés humaines. Puisque les unes et les autres sont indissociables. Et qu'il leur arrive même de présenter de stupéfiantes analogies.

29 mai 2009

 

 

ROLIN Olivier : "Un chasseur de lions" (Seuil). Ou comment l'achat d'un livre en Patagonie conduit l'auteur sur les pistes parallèles (quoique parfois convergentes) d'un illustre inconnu et d'un peintre d'exception. Manet Edouard, d'un côté. De l'autre, Pertuiset Eugène, affairiste et aventurier, que le peintre immortalisa devant la dépouille d'un lion évidemment féroce. Avec, pour toiles de fond, la Paris de la Commune et la Patagonie non encore soumise aux lois de la civilisation occidentale. Le Lecteur, souvent passionné, parfois irrité, demeure sur un sentiment mitigé qui doit plus à sa paresse d'estivant potentiel qu'au talent d'Olivier Rolin.

9 juillet 2009

 

 

ROTH Philip : « Exit le fantôme » (Gallimard). Le Lecteur pressent qu'il atteint au terme d'une aventure. Cet antépénultième roman de Philip Roth le lui signifie. A travers le récit dont l'auteur a confié la responsabilité de l'écriture à Nathan Zuckerman. Une fois encore, une fois de plus. Pour une sorte d'adieu à ce personnage que les familiers de Philip Roth connaissent bien. Ce personnage qui a traversé l'histoire contemporaine de l'Amérique. Ce personnage qui, dans cet ultime récit (?), quitte son ermitage pour retrouver New-York, pour y vivre une ultime passion (?) tout en cheminant dans les ornières de son passé. Au cours de cette sorte de semaine sainte où l'Amérique progressiste gravit son Golgotha en portant la croix que constitue la réélection de Bush Jr. Le Lecteur fréquente Roth depuis fort longtemps ("Goodbye, Colombus", "Portnoy et son complexe"...). Roth est, en quelque sorte, un intime. Dont il s'indiffère qu'il soit nobélisable ou pas. Puisque Roth occupe, dans sa modeste histoire de la littérature contemporaine, une place d'exception. Et que son vieux coeur s'est emballé à écouter une fois encore les cris de rage contenue proférés par Nathan Zuckerman.

Et qu'il n'est pas loin de partager cette opinion que Roth confie à une comparse: "Pendant les années de guerre froide, en Union Soviétique et dans ses satellite d'Europe de l'Est, ce furent les écrivains dignes de ce nom qui furent proscrits; aujourd'hui, en Amérique, c'est la littérature qui est proscrite comme capable d'exercer une influence effective sur la façon qu'on a d'appréhender la vie. L'utilisation que l'on fait couramment de nos jours de la littérature dans les pages culturelles des journaux éclairés et dans les facultés des lettres est tellement en contradiction avec les objectifs de la création littéraire, aussi bien qu'avec les bienfaits que peut offrir la littérature à un lecteur dépourvu de préjugés, que mieux vaudrait que la littérature cesse désormais de jouer le moindre rôle dans la société."

En Amérique, cher Philip? Mais n'est-ce pas pire encore en France, ce pays où l'on prend un malin plaisir à singer l'Amérique jusqu'à outrepasser la caricature?

Allons! Aujourd'hui, et par respect, par amitié pour Philip Roth, je contiendrai mon propos et n'irai donc cracher ni sur Frédéric ni sur Nothomb!

22 octobre 2009

 

 

 

ROUAUD Jean : "La femme promise" (Gallimard). Non, décidément, le courant ne passe pas. Et cela depuis près de vingt ans. Autant dire depuis que Rouaud est entré dans la carrière. Avec "Les Champs d'honneur", seul roman qui trouve grâce aux yeux du Lecteur. Effets secondaires du caniculisme? Il s'est empêtré dans ce roman plein de tics (dont la démultiplication des "et", une sorte de record en la matière). Un détail? Peut-être? Mais de temps à autre, trop c'est trop.

9 juillet 2009

 

 

SCHOEMAN Karel : "Cette vie" (Phébus). Au seuil de la mort, une vielle femme se confronte aux souvenirs les plus marquants de son existence. "Je me suis souvenue de ce que j'avais oublié, j'ai mis des mots sur ce que je ne voulais pas savoir, ma mission est accomplie..... Le puzzle est étalé devant moi, tous les éclats, tous les fragments sont en place, ma tâche est terminée, et ce n'est pas à moi de juger si le travail a été bien ou mal fait."  Le Lecteur juge, lui, que le travail a été bien fait. Les grincheux reprocheront peut-être la forme classique du roman. L'essentiel n'est pas là. L'écrivain sud-africain a usé du burin pour graver une oeuvre d'une exceptionnelle intensité. Tant dans l'évocation de l'histoire d'une famille d'Afrikaners que dans cet art si singulier de peindre les paysages rudes et austères de leur environnement. Au cours de ce siècle, le 19°, où l'enracinement sur des terres étrangères et hostiles s'accompagna d'une multitude de souffrances refoulées. "Cette vie" d'une femme ignorée, sorte d'ombre diaphane, est à coup sûr un des textes sur lesquels il est profitable de s'arrêter longuement.

28 décembre 2009

 

 

 

SCHWARTZ-BART André : "L'étoile du matin" (Seuil). Des retrouvailles post mortem. Dont le Lecteur s'extirpe tout endolori: ce roman aborde au pire de ce que fut l'abomination. L'expulsion et l'extermination du peuple juif au centre d'une Europe à feu et à sang. Le Lecteur simplifie. Trop, peut-être. Car derrière le personnage (Haïm) ne se dissimule même pas l'engagement de Schwartz-Bart du côté de la cause sioniste. Un engagement que le lecteur ne réprouve pas. Mais dont les développements contemporains l'interrogent.

Tout à la fin du roman, André Schwartz-Bart écrit: "... il n'y avait pas, au début des années trente, une graine de monstre dans chacun des membres de la jeunesse allemande; il suffisait, peut-être, que s'y trouvât une graine d'homme. Tout ce qu'il avait connu, par la suite, sur la terre, n'avait fait que confirmer cette idée d'une chose banale, infiniment prosaïque, fertile en sueur et en sang. Le cerveau humain lui était apparu comme une matière docile, malléable, d'une plasticité infinie. Le mot qu'il se répétait cent fois par jour, au long des années, tout est possible."

C'est sur ce "tout est possible" que s'interroge, aujourd'hui, le Lecteur. Tant il lui semble que ce "tout est possible" n'épargne personne, y compris, dans ces temps de confusion totale, certains des petits-enfants des victimes de la barbarie. Dont les cerveaux, à l'instar de tous les cerveaux humains, sont sans doute "comme une matière docile, malléable, d'une plasticité infinie".

11 décembre 2009

 

 

 

SERVIN Juan Manuel : "Chambres pour personnes seules" (Les Allusifs). Court roman d'un écrivain mexicain dont le Lecteur ne se souvient plus dans quelles circonstances il releva le titre et le nom de l'Auteur. Qu'importe! Le voici, le Lecteur, qui se remet à peine d'un choc peu ordinaire. Un choc consécutif à l'extrême violence d'un récit qui narre quelques jours de la vie d'un homme dont l'avenir se borne à son proche lendemain. Qu'il renouvelle donc au terme de chacun des jours au cours desquels il a assuré sa survie. Roman dense, roman d'une âpreté peu ordinaire, roman des souffrances enfouies, roman des combats à la vie à la mort. Si l'oeuvre reflète sans aucun doute certaines des réalités mexicaines, elle atteint également à l'universalité, tant il est évident que les réalités particulières atteignent elles aussi à l'universalité.

28 décembre 2009

 

 

 

SHAFAK Elif : "Bonbon Palace" (Phébus). La vie d'un immeuble d'Istanbul et de ses habitants, dans un environnement plutôt aléatoire. Le roman se déguste comme un bonbon acidulé. Sa drôlerie tend toutefois à s'édulcorer au fil des pages et le panorama qu'il dépeint de ce qui pourrait être la société turque y perd, peu à peu, de sa pertinence.

21 mars 2009

 

 

SKOROBOGATOV Alexandre : "Véra" (Autrement). Nikolaï aime Véra. Nikolaï, avec la collaboration d'une ombre ou d'un double, se convainc que Véra le trompe. L'obsession jusqu'à la folie. Plutôt bien narrée. Un roman percutant. Un roman dérangeant. Dans la lignée d'une littérature russe dont le Lecteur fut friand en ses vertes années.

28 décembre 2009

 

 

SORRENTINO Gilbert : « La lune dans son envol » (Actes Sud). Une vingtaine de nouvelles dont l'auteur (américain) est totalement inconnu du Lecteur. Réactions mitigées. L'ennui en deux ou trois circonstances. Rires (ou sourires) parfois. Mais aussi de franches rigolades, telles que celles générées dans le texte intitulé "La dignité du labeur". Dans l'air du temps. Où l'on découvre tant d'analogies avec des problématiques hexagonales. Qui, par exemple, s'empilent dans les exigences d'un directeur de succursale. "Ignorez les secrétaires. Ne parlez pas avec les employés d'UPS. Ne parlez pas au facteur. Ne traînez pas avec ces putains de routiers. Ne vous inquiétez pas de tous les petits détails de l'inventaire. Pourquoi mon stylo ne marche pas. Renvoyez le chauffage. Qu'est-ce que vous voulez dire commande en souffrance. Fermez votre chemisier. Fermez votre jupe. Remontez votre culotte Ne réveillez pas le chat qui dort..."

3 novembre 2009

 

 

STANISIC Sasa : "Le soldat et le gramophone" (Stock). Le Lecteur n'a toujours pas compris pourquoi la "communauté" internationale (et la communauté européenne en particulier) s'est résignée à accompagner la mise en lambeaux de l'ancienne Yougoslavie. Le Romancier, lui, s'évertue à mettre à jour les douleurs consécutives au déchirement et à tout ce qu'elles impliquèrent. Son roman s'ouvre des souvenirs festifs, ceux d'un enfant, qui ne sont pas sans rappeler certains des films de Kusturica. Puis débute la tragédie. Et le Narrateur s'égare, revient sur ses pas, s'égare encore. Il assiste à la décomposition qu'il ne justifie pas, à laquelle il ne consent pas. Il la subit, avec au terme du processus, l'exil. Jusqu'à ce retour au pays, qui n'est plus un pays, mais un lambeau de l'ancien pays. Si le Lecteur demeure perplexe, il s'est tellement senti proche du Narrateur qu'il attend déjà de lui d'autres partages.

29 mai 2009

 

 

SUTER Martin : "Le dernier des Weynfeldt" (Bourgois). Le Lecteur succombe à un désagréable sentiment, comme si Monsieur Suter avait tenté de ce foutre de sa gueule. Ce qui relève du subjectif, Il le concède. Mais tout de même. Donc, l'ultime avatar des Weynfeldt. Qui dilapide son immense fortune en récupérant, entre autres, toutes les factures que ses amis sont dans l'incapacité de payer. La farce n'a aucun goût. Mais le ridicule ne tue plus.

21 mars 2009

 

 

TABUCCHI Antonio : "Le temps vieillit vite" (Gallimard). Quelques fragments de l'histoire contemporaine s'insèrent dans des récits au sein desquels le temps semble si souvent se diluer. Comme si la mémoire n'était en mesure que de restituer des lambeaux d'émotions, les parcelles des joies et des souffrances qui habitent chacun des personnages. "... elle eut l'image d'un enfant qui tenant la main de sa mère revient d'une fête foraine, la fête est finie, c'est dimanche soir et l'enfant tient un ballon plein d'air attaché à son poignet, il le tient fièrement comme un trophée et tout à coup, plof, le ballon se dégonfle, quelque chose l'a crevé, mais quoi, peut-être l'épine d'une haie? Elle eut l'impression d'être cet enfant qui tout à coup se retrouve avec un bout de caoutchouc dans les mains, quelqu'un le lui avait volé, mais non, le ballon était encore là, on lui avait simplement retiré l'air qu'il y avait dedans. En allait-il donc ainsi, le temps était-il de l'air qu'elle avait laissé sortir par un petit trou minuscule dont elle ne s'était pas rendu compte? Mais où était le trou? elle ne réussissait pas à le voir." Le Lecteur, qui entretient une très longue relation avec Antonio Tabucchi, s'est émerveillé lors de la découverte de chacun des neuf récits. Jamais il ne s'est senti aussi proche de l'écrivain. Ce qui est sa façon à lui de lui rendre un vibrant hommage.

22 août 2009

 

 

Tardieu  Laurence: « Un temps fou » (Stock). Une bêtasserie très lelouchienne. Chabadaba et tout ce qui va avec, autant dire presque rien.

13 novembre 2009

 

 

THEDOROPOULOS Takis : « Les sept vies des chats d’Athènes » (Sabine Wespieser). A défaut de pouvoir disposer de "L'invention de la Venus de Millo", (toujours absente des rayonnages de la médiathèque Emile Zola), le Lecteur a opté pour "Les sept vies des chats d'Athènes". Il n'a pas à le regretter. L'humour du romancier grec l'a souvent mis en joie. Thedoropoulos narre l'histoire de la résistance d'un groupe de dames respectables et de leur gourou contre l'arbitraire des autorités d'Athènes qui, à la veille des jeux olympiques de 2004, prétendent exterminer la population féline Puis il conclut cette histoire par de drôlatiques biographies, celles des chats philosophes.

Le Lecteur accorde ici, et de manière arbitraire, une place privilégiée à Platon: "De plus, on rapporte que c'est Platon lui-même qui aurait élaboré la manière dont son âme devait franchir les siècles - comme tous les génies, il avait une confiance limitée dans le critère esthétique des générations futures. Il s'agissait d'un système de mathématique fort élaboré, qui lui permettait de multiplier les sept âmes par un genre algorithme afin d'obtenir un nombre guère éloigné de l'infini. Le même chiffre correspondait à la courbe exacte - moyennant une rectification de l'ordre d'une infime décimale - que décrit le chat en mouvement. De sorte que le philosophe, en répétant ce mouvement, était en mesure de se déplacer à travers l'espace et le temps...."

23 novembre 2009

 

 

THIBAUX François : "Ultime été" (Anne Carrière). Celui qui rapproche une jolie servante au grand cœur et un orphelin recueilli par sa grand-mère. Un roman gentiment gnangnanteux.

9 août 2009

 

 

TOLTZ Steve : "Une partie du tout" (Belfond). Une oediperie australienne qui n'a jamais concerné le Lecteur.

28 décembre 2009

 

 

 

TRAN HUY Minh : "La princesse et le pêcheur" (Actes Sud). Tout plein de bons sentiments. Auxquels se greffent quelques pages sur le Viet-Nam de l'avant, du pendant et de l'après de ce que chacun sait.

4 juin 2009

 

 

TRESVAUX Xavier : "Les gogols" (Gallimard). Ici, le Lecteur se confronte à un exercice redoutable. Non qu'il ait jamais fréquenté l'Auteur. Mais il entretient des relations avec la maman et le papa de l'Auteur. Lesquels sont également des personnages intégrés au roman. D'où sa gêne. Celle qui résulte d'une approche contradictoire. Le Lecteur s'est délecté de la seconde partie du roman, drôle, féroce, iconoclaste. En dépit d'une certaine retenue qui maintient le propos dans les limites de "l'acceptable" (à travers la vision d'une maison d'édition qui se prétend respectable). Le traitement de ce qui n'est pas encore l'Histoire, qui ne relève, dans son immédiateté, que de l'actualité pipeulisante, ce traitement met en exergue un talent qui sait conjuguer la caricature à l'outrecuidance: les frasques de Chirac, Villepin et Sarkozy. Un traitement qui s'emboîte parmi les lambeaux de l'existence du narrateur (un certain Stanislas Berthier), et que scandent des épisodes de la vie familiale. Le Lecteur l'affirme: cette seconde partie du roman est d'une excellente et jubilatoire facture. Celle-là même qui laisse entrevoir l'Ecrivain (contraint, pour survivre, d'occuper les modestes fonctions de veilleur de nuit dans un hôtel qui n'est même pas un palace). Mais le Lecteur faillit bien souvent s'égarer lors de sa découverte de la première partie. Au point d'y perdre parfois son nord à lui. Qui n'est évidemment pas le nord de l'Ecrivain. D'où se prudente réserve qu'altère une certaine réticence. Tant il eut goûté sans retenue à l'explosion d'une colère qui trop se contient.

Désormais, le Lecteur attend  le second roman de Xavier Tresvaux. Une attente qui relève peut-être de l'aléatoire. L'Editeur Gallimard qui fonctionne depuis une bonne vingtaine d'années à la façon d'un quelconque épicier, cet Editeur-là est tout sauf un philanthrope.

8 avril 2009

 

 

TRISTANTE Jeronimo : "Le Mystère de la Maison Aranda" (Phébus). Un jeune flic plutôt fringant qu'un vieux flic avait pris sous son aile. Une aristocratie imbue de ses privilèges. Un tueur en série dont les cibles privilégiées sont des prostituées. Et les mystères de la maison Aranda. Le tout dans le Madrid de la fin du 19° siècle. Du convenu. Sans la moindre once du surprise. Mais point désagréable à lire.

2 juillet 2009

 

 

UGRESIC Dubravka : "Le ministère de la douleur" (Albin Michel). Une douleur insondable. Celle qui afflige l'auteure, Dubravka Ugresic et qui suinte au détour de chaque phrase. Celle qu'elle transfère dans chacun de ces personnages. Elle qui ne dissimule pas son regret plus que sa nostalgie pour cet état multiculturel que fut la Yougoslavie. Qui évoque donc le drame de la rupture, de cette heure sacrilège où non seulement, on décide de ne plus vivre ensemble, mais où l'on s'accoutume à véhiculer la haine de l'autre, le voisin, l'ami ou le parent d'hier. Ce roman de et sur la fracture met en exergue les refus de la trahison, de l'asservissement à l'un ou l'autre camp. Ce roman est un cri de colère contre une guerre immonde. Mais s'il s'enracine dans ce que fut le terreau yougoslave, il acquiert par ailleurs une vertu cardinale. Celle qui contraint le lecteur à s'interroger sur la multitude des périls qui menacent l'univers apparemment chloroformisé au sein duquel il survit. Comme un appel à la vigilance. Comme un tocsin qui sonnerait sans relâche pour le contraindre à garder l'esprit et le coeur large ouvert à l'autre, aux autres. Un roman plus qu'utile, un roman indispensable. L'oeuvre majeure d'une auteure accomplie.

9 janvier 2009

 

 

UPDIKE John : « Villages » (Seuil). Voilà tellement longtemps que le Lecteur fréquente Updike qu'il s'interdit à l'égard du romancier américain, décédé voilà bientôt deux ans, la moindre malveillance. Même si ce roman l'a plutôt laissé sur sa faim. Même si la verve de l'auteur lui paraît s'être émoussée. Même s'il a parfois eu l'impression d'évoluer sur un terrain connu, peut-être même trop connu. "Villages" recèle toutefois de petits trésors. Moins dans les reflets de ce que fut la vie semi-rurale américaine (les dits "Villages") voilà 40 ou 50 ans, que dans les portraits des quelques femmes qui se hasardèrent sur les sentiers tortueux de leur émancipation. Ce roman n'est évidemment pas un aboutissement: il n'est qu'un fragment dans une oeuvre conséquente.

22 octobre 2009

 

 

VALLEJO François : "L'incendie du Chiado" (Viviane Hamy). Déçu. Par rapport au précédent roman de cet écrivain ("Ouest"). Déçu, mais pas au point de cracher dans la soupe. Non. Je reviendrai vers François Vallejo. Je précise simplement que son récit m'a très peu concerné. Les quatre personnages, qui confrontent leur(s) histoire(s) parmi les ruines d'un quartier de Lisbonne ravagé par un incendie, ces quatre personnages me restent encore, le livre refermé, totalement étrangers. En dépit de la présence d'un visiteur français qui cherche à retrouver quelques traces de son père dans la capitale portugaise.

12 février 2009

 

 

VARGAS Fred : "Un lieu incertain" de Fred V (Viviane Hamy). Un peu plus que du polar. Une façon d'écrire si particulière à l'auteur. Son art de greffer du fantastique à ses récits. Sa capacité à se réapproprier les vieilles mythologies, de les dépoussiérer. Ici, les vampires. D'un cimetière londonien jusqu'à un village serbe, en passant par Garches. Le Lecteur (moi-même) n'y a pas perdu son latin. Il a accompagné le commissaire Adamsberg tout au long de ses nouvelles pérégrinations. Il n'a pas connu le moindre instant d'ennui ou d'indifférence. Toujours fidèle à Fred Vargas.

30 janvier 2009

 

 

VERONESI Sandro : « Chaos calme" (Grasset). ".... et maintenant j'ai une définition de calme chaos: une chasse sans fin, une chasse où, d'un moment à l'autre, le chasseur peut se transformer en gibier..." Voilà, sans doute, "mon" roman de l'année 2008. Dans la mesure où, bien évidemment, je me hasarderais à établir des hiérarchies. Dont "ma" lecture a débuté le mardi 30 décembre et s'est achevée ce vendredi 33 décembre 2008. Un roman accompli. Un roman multidimensionnel. Un roman reflet. Un roman miroir. Un miroir qui concentre l'essentiel et les accessoires. Ceux qui donnent sens au monde dans lequel nous survivons, vous et moi. Le sens du n'importe qui imbriqué dans le n'importe quoi universel. Je ne déflorerai donc pas le sujet, même si le sauvetage en mer de deux imprudentes nageuses survolta ma libido, même si la Carla du roman est d'une autre étoffe que celle qui s'est acoquinée avec le Minuscule. Refermé, le roman vibre encore en moi. Que ce roman m'interroge. Qu'il me désespère. Qu'il me réjouit. Qu'il m'exulte.

9 janvier 2009

 

 

VOLLMANN William T. : "Pourquoi êtes-vous pauvres?" (Actes Sud). Le Lecteur n'est pas sorti indemne de cette rencontre. Il avait déjà croisé et apprécié Vollmann ("Les fusils" et "Central Europe", entre autres). Cette fois,entraîné dans le tour du monde de ce que l'Ecrivain appelle la "pauvreté", il s'est trouvé dans l'obligation de modifier sa perception, d'apporter plus d'attention et donc de vigilance à des questions qu'il a parfois tendance à exiler parmi les territoires de l'oubli.

Vollmann a donc observé la pauvreté là où, selon les schémas les plus classiques, elle s'enracine sans que rien ne puisse la contenir (Afghanistan, Irak, Colombie, Chine, Philippines, Mexique, Bosnie). Mais le Lecteur s'est vu dans l'obligation d'entrouvrir ses fenêtres à lui sur sa proximité. Car si l'Ecrivain s'est également penché vers les pauvretés qui sont celles de son environnement direct (les Etats-Unis), le Lecteur, lui, a découvert dans le tableau peint par l'Américain des personnages à la ressemblance de ceux qui croisent si souvent son chemin.

Ce voyage au sein d'une humanité différente, de l'humanité privée d'avenir, a généré un livre dont le Lecteur a l'outrecuidance de considérer que, sous la forme de dialogues impromptus, il met à nu ce qui constitue le pire des échecs des sociétés dites démocratiques. Point de faux semblants. Pas la moindre trace de sentimentalisme. La pauvreté se révèle, à travers l'addition de ses particularités, dans son universalité. Le travail de Vollmann n'est pas celui d'un sociologue mais bien d'un écrivain. Il le définit lui-même dans les quelques lignes que le Lecteur reproduit ici.

"Les Nations Unies établissent les "dimensions de pauvreté" suivantes: vie brève, illettrisme, exclusion, absence de ressources matérielles.

Ma propre liste, aisément déductible de la première, comportait celles-ci: invisibilité, difformité, rejet, dépendance, vulnérabilité, douleur, indifférence, aliénation.

Je ne prétends pas savoir (et c'est là une question à laquelle le XXI° siècle devrait s'atteler) quelle proportion de pauvres est en butte à ces phénomènes. Je peux simplement dire que je les ai remarqués "chez" des pauvres, lesquels, comme d'autres personnes ressentant d'autres choses, les éprouvent au rythme des caprices de l'existence. Et ces catégories sont elles-mêmes capricieuses, allant, parfois, jusqu'à s'exclure mutuellement (douleur et indifférence, invisibilité et difformité). Communiquer étant, à l'instar d'autres talents, réservé aux riches, les pauvres qui apparaissent dans ce livre n'arrivaient pas toujours à me dire ce que je voulais savoir. Les dates de Natalia ne concordaient pas et leurs souvenirs, comme les miens, étaient incohérents -l'une des raisons pour lesquelles ce livre ne peut se contenter d'être un recueil d'histoires orales.

Quoi qu'il en soit, voici une catégorisation de plus, attristante et probablement inutile, des dimensions de la pauvreté."

25 février 2009

 

 

 

WAJSBROT Cécile : "L'Île aux Musées"  (Denoël). Entre Paris et Berlin, quatre voix qui conjuguent leurs attentes. Face à une sorte d'intemporalité des statuaires.

"Combien sont-ils ainsi, en d'autres temps, en d'autres lieux, combien sont-ils aujourd'hui à parcourir le monde sans s'arrêter, espérant trouver un havre, un lieu d'accueil où habiter enfin, mais ils ont beau traverser les déserts et vaincre la faim, traverser la mer et vaincre la tempête, personne ne veut les recevoir. On les rejette, on les raccompagne aux frontières, on les renvoie chez eux alors qu'eux-mêmes ne savent pas ce que cela signifie. Est-on chez soi quand on a faim, quand l'avenir est de marcher dans un long tunnel noir? Est-on chez soi quand on est menacé, qu'on a peur, quand l'ennemi rôde, armé, prêt à donner la mort?

Caïn vient de tuer son frère et ne sait que faire de ces mains dont il a suivi l'impulsion. La douleur est difficile à exprimer dans la pierre ou le marbre. Mais en le regardant, même sans connaître son nom, en approchant de cette forme, de cette silhouette affaissée, on ne pense ni à la beauté ni à la faute, ni à l'esthétique ni à la morale, on est là, simplement, devant quelqu'un ou plutôt une image de soi -ce qu'on a été un jour, ce qu'on pourrait être."

Une longue citation. Qui est illustration de ce roman étranger aux modes. L'évocation de "Caïn venant de tuer Abel", une sculpture de Henri Vidal exposée au jardin des Tuileries (Grand Bassin).

30 janvier 2009

 

 

 

ZEH Juli : "L'ultime question" (Actes Sud) Le Lecteur ressent un sentiment mitigé. Entre le plaisir et la frustration. Au bout du compte, le premier a pris le pas sur la seconde. Cette sorte de polar fantastique oppose deux faux jumeaux. Mais puisque, en dépit des apparences littéraires, le roman est assimilable à un polar, le Lecteur ne déflorera pas le sujet. Il précise toutefois que la lecture du précédent roman de Juli Zeh ("La fille sans qualité") lui avait procuré des sensations à la fois plus riches et plus subtiles.

21 mars 2009

 

 

 

Publicité
Publicité
Commentaires
Lectures
Publicité
Publicité