« Ce que l’on sème »

PORTER Regina

(Gallimard)

Une rencontre non préméditée. Mais un choc, d’autant plus violent qu’il est survenu au cours des journées qui marquèrent le dernier acte de la grande farce américaine. Et que le Lecteur qui point trop ne s’interrogeait sur le duel qui opposait deux vieillards guerroyant l’un et l’autre afin d’obtenir le droit d’occuper à la Maison Blanche les fonctions définies comme suprêmes par la société des Bien Pensants.

Un choc, parce qu’immergé dès les premières pages dans cinquante années de l’histoire des USA, de la fin de la Seconde Guerre mondiale aux années Obama. Non pas dans l’ordre chronologique des évènements mais dans une sorte de confusion permanente, un fatras a priori inextricable mais qui finit par trouver sa cohérence. Puisque l’Amérique et son rêve ne se revendiquent pas de la cohérence, mais d’un incessant vagabondage à saute-temps.

Donc le rêve. Celui de Luther King (pour faire court). Deux familles que tout sépare : une famille noire et une famille blanche. Qui évoluent l’une et l’autre selon des modalités spécifiques, à travers les conflagrations qui les unissent parfois, qui les opposent si souvent. Dont la guerre du Viet Nam avec les terribles, les douloureuses conséquences pour celles et ceux qui s’en sortirent point trop abîmés. Cinquante années pour que ces deux familles-là finissent par se rapprocher. Sans qu’il soit certain que les blessures anciennes fussent définitivement cicatrisées.

Le Lecteur s’est laissé porter par un texte dont il est nécessaire, pour y trouver sa place, d’accepter de respecter les règles du jeu imposées par l’Auteure, noire américaine dont c’est le premier roman. Un roman que le Lecteur a refermé comme à regret, épris des personnages au point d’en sentir, à l’heure où il libelle ces quelques lignes, quelques-uns continuer à vivre en lui.

« Il y a une chanson à propos des oiseaux et des abeilles dans les arbres. C’est un peu ce à quoi ressemblait mon enfance. Et puis les papillons et les oiseaux, et peut-être même ces foutues abeilles, se sont envolés avec les mensonges que nous balançaient nos profs à l’école. Ils se sont enfuis avec ces conneries, ils ont évité notre quartier où les vraies gens comme mes parents essayaient juste de trouver leur voir. Et espéraient qu’on trouverait la nôtre aussi, un jour. »

Ce que l'on sème

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