« La Belle Aude »

DELTEIL Joseph

(Editions Collot)

« La vérité se cache partout, je ne la cherche pas, je la fuis. »

Une retrouvaille. Le hasard. Qui, parfois, fait assez bien les choses. Un Ecrivain que le Lecteur fréquenta assidument. Delteil. Lequel Delteil évoque dans ce si court ouvrage la terre dont lui viennent les plus intenses des vibrations. Le pays cathare.

Six chapitres. Quelques paragraphes. Une atmosphère. La luminosité si particulière. Les odeurs. Les gestes des hommes. Les jambes bronzées d’une femme rencontrées dans un tortillard. Des paysages fastueux. Du Delteil pur jus. Vieux de même pas trente ans !

« Ils se sont mis en bras de chemise, comme des bouchers. Le col nu, les mains vives à même les souches. Toute cette fraîcheur qui sent les larmes. A la serpe, à la cisaille, on tranche les raisins à tour de bras. On vendange comme on nage. A cru. Ces beaux raisins matutinaux dont l’idéale architecture m’a toujours paru être un écho des architectures du ciel, on les jette en tas dans les seaux sanglants. De quel air d’épais vainqueurs ! Puis on vide le tout dans les comportes à bloc. Là, d’espiègles enfants armés de massues, pareils dans leurs libres culottes à de petits Hercule de terre cuite, écrasent royalement la vendange, avec l’insensibilité des enfants. Rouges victimes, raisins ! O vigne Iphigénie ! Toute cette allégresse dans cette cruauté, la santé qui plane sur ce carnage ont quelque chose de barbare et de merveilleux qui m’empoigne aux quatre coins du cœur. Je m’attarde à ce spectacle comme au centre même de la vie. Ici, dans ma vigne, je me sens enfin une âme de conquérant. »

La Belle Aude

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