« Ultra-Proust »

QUINTANE Nathalie

(La Fabrique)

« Les écrivains que nous aimons ne peuvent pas nous servir de guides, puisque nous possédons en nous comme l’aiguille aimantée ou le pigeon voyageur, le sens de notre orientation. »

Donc Marcel. Que le Lecteur fréquenta en ses vertes années. Puisqu’il était de bon ton en ces temps reculés d’afficher ce qui relevait de la passion littéraire. Voilà désormais plus de cinquante ans que le Lecteur n’a plus remis le nez dans l’œuvre de Proust. Non par négligence ou par paresse. Mais en raison de réticences « idéologiques ». Comme un refus de faire sienne la forme sublimée de la littérature « bourgeoise ».

Et voilà que Nathalie Quintane met cul par-dessus tête ses préjugés (préjugés issus d’une lecture inaboutie). Lui qui s’en est venu vers cet ouvrage non pas en raison de Marcel, mais parce que depuis quelques années la fréquentation régulière de Nathalie Quintane lui est source de jouvence. Tant cette jeune Auteure s’est inventé un territoire littéraire qui l’interpelle et le contraint à se défaire d’un respect factice des modes qui s’imposent à lui via la Médiatouillerie bien pensante.

Nathalie Quintane ne pense pas (et donc n’écrit pas) comme il est convenu de penser (et d’écrire) dans une société qui a désormais outrepassé le stade de l’intolérance. Nathalie Quintane est un des rares écrivains « libres » en ces temps où tant de ses confrères s’accommodent du renoncement. Avec son « Ultra-Proust », elle lance donc un nouveau pavé dans la mare où stagnent les eaux croupies de la bien-pensance. Quitte (mais cela elle l’ignore) à déranger le vieux Lecteur qui depuis quelques semaines lorgne sur « ses » Proust (sans toutefois avoir pris le risque d’entreprendre ne serait-ce qu’une feuilletaison).

« Nous sommes plus ou moins embarqués dans ce besoin, pour vivre, de ne pas troubler l’autre, ou du moins de ne pas trop le troubler, de manière à ce qu’il ne lui vienne pas à l’idée de nous troubler nous. L’effort de communication des médias et des libraires, par exemple, vise à intriguer sans la repousser une partie de la population qui déjà s’offre à une activité marginale (la lecture de livres de littérature, ou pire encore, de théâtre ou de poésie) et entend rester bizarre dans certaines limites. Lire un livre est une activité insolite, et parmi les livres qu’on lit, il y en a d’insolites – et c’est exactement cet adjectif, « insolite », qu’on emploie à tout bout de champ dans les offices de tourisme et sur les sites de voyage _ insolites (ou « perchées ») mais tout à fait praticables, s’entend, surtout si politiques… »

Ultra-Proust

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