« Jojo, le gilet jaune »

SALLENAVE Danièle

(Tracts/Gallimard)

Un second tract (après celui libellé par Pierre Bergounioux). Un tract qui parle intelligemment, avec rigueur et sincérité de ce que fut (de ce qu’est peut-être encore le mouvement des Gilets jaunes. Point d’arnaque ni de travestissement. Aucun amalgame ni mise en demeure. L’observation scrupuleuse d’un mouvement qui a réveillé la société française et contraint le Pouvoir à des reculs révélateurs de ce que furent ses peurs. Lui qui avec le concours de ses alliés et de ses obligés n’eut de cesse d’user et d’abuser du mot « populisme » pour tenter de réduire à néant un mouvement d’une ampleur qu’il n’avait pas su prévoir.

« Mais aujourd’hui l’accusation de populisme ne vient pas là par hasard, elle est bien commode, elle permet de déconsidérer les Gilets jaunes ; elle donne aux élites de gauche comme de droite l’occasion de donner une fois de plus une leçon « au peuple », persuadée que c’est son rôle. Il faut savoir ! dit-on aux Gilets jaunes. Avouez que vous êtes incohérents ! Vous vous plaignez de la représentation politique ? Mais la France a le meilleur système en Europe ! Vous voulez moins d’impôts et plus de protection sociale ? Ah mais, désolés, ça n’a pas de sens. Vous voyez, vous ne pouvez pas vous passer de nous, vous n’avez pas fait l’ENA, vous manquez peut-être un peu d’intelligence économique et même d’intelligence tout court. »

Donc un regard utile, un regard nécessaire et une parole qui s’essaie à inscrire le mouvement dans une perspective historique fort éloignée des gesticulations d’un Monarque abasourdi que son pouvoir absolu ait été à ce point contesté par des meutes de gueux et d’illettrés.

« A ce principe (« Il n’est de pouvoir qu’en Dieu »), la Révolution en a substitué un autre : l’immanence, l’horizontalité de la souveraineté populaire. Affrontement décisif, fondateur, qui n’a toujours pas trouvé sa résolution définitive deux cent trente ans plus tard puisque, en avril 2018, le président Macron l’affirme dans un entretien : « J’assume la verticalité du pouvoir. » Six mois plus tard, le soulèvement des Gilets jaunes, en s’appropriant l’espace public, construit confusément un espace d »horizontalité démocratique qui retrouve l’inspiration de 1789, de février 1848 et de la Commune. »

Jojo, le gilet jaune

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