« La rivière »

KINSKY Esther

(Gallimard)

Comme un avatar du romantisme allemand nimbé et enrichi de ce qui provient de la culture juive. Une musique qui bouleverse tout en donnant l’envie de bouger. Les installations provisoires de la Narratrice dans des paysages si différents les uns des autres. Mais que relie un point commun : l’eau qui s’écoule. Sous des modalités diverses. Fleuves, rivières, ruisseaux, avec les paysages qui les caractérisent.

La Narratrice a quitté les rives du Rhin pour s’installer à Londres. Londres où elle vit de petits boulots et où elle réside dans des quartiers populaires, dans la proximité d’autres exilés venus, eux, d’Afrique ou d’Orient. Londres cité tentaculaire qu’elle parcourt et observe. Londres où elle revient sans cesse vers la rivière Lea et ses paysages avec lesquels elle instaure ce qui s’apparente à un dialogue. Un dialogue qu’elle enrichit de photos (dont quelques-unes sont reproduites au fil du récit, non comme des illustrations mais comme une incitation à aller plus loin, à poursuivre le voyage).

« De l’autre côté de la rivière se trouvait un petit bois d’aulnes, un lieu à demi sauvage où les brumes se concentraient, les jours de grand froid. Le bosquet tout entier n’aspirait qu’à régner sur le domaine enchanté du roi des Aulnes, mais des élagueurs non initié s’étaient fait la main en le déboisant. »

Un récit tout en demi-teinte. Une écriture si fluide que le texte devient ruisseau, rivière, fleuve. Au gré des errances d’Esther Kinsky. D’un retour des rives du Rhin au Saint-Laurent, du Gange jusqu’au lit quasiment desséché d’une rivière pas très loin de Tel-Aviv. Le Lecteur accompagna la Narratrice, partagea avec elle les fugaces émotions de la découverte (ou de la redécouverte pour ce qui concerne les rives du Rhin, parmi les territoires où le fleuve se résigne enfin à se diriger vers la Mer du Nord). Un récit qui ne joue pas sur l’émotion superficielle, qui au contraire oblige à observer des mondes dont il devient évident, au terme du voyage, qu’ils ne constituent qu’un seul et même monde.

La rivière

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