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4 mai 2022

Fenua

fenua-5288

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Fenua »

DEVILLE Patrick

(Seuil)

 

Patrick Deville est un grand voyageur, curieux de découvrir le monde. Le vieux Lecteur est un voyageur immobile, curieux lui aussi de découvrir le monde. Le vieux Lecteur découvre régulièrement l’œuvre que construit Patrick Deville, une œuvre dont Fenua est l’élément le plus récent. Celui qui a titillé sa curiosité sans cependant faire naître, comme en d’autres circonstances son enthousiasme. Malgré ou en dépit de quelques rencontres agréables. Celle de Gauguin, en premier lieu. Mais aussi celle de Victor Segalen. Ainsi que celles de Melville, de Stevenson et de London. Mais également, la contrepartie en quelque sorte, des rencontres moins agréables à ses yeux: Loti, Simenon, Gerbault. D’interminables navigations au cœur de Fenua, soit donc dans ce qui est toujours – colonialisme oblige – la Polynésie française (dont Tahiti constitue l’épicentre). Avec d’inévitables séjours aux Marquises où gémir n’est pas de mise. Alors que les feux nucléaires ne sont toujours pas éteints à Mururoa. Alors que le fantôme de Gaston Flosse se laisse toujours entrevoir sur ces terres lointaines où la vieille canaille fut l’hôte fidèle de Jacques Chirac, cinquième roi de la dynastie prétendument républicaine qui est l’ornement de la vieille France.

« Parvenant à me convaincre que la contemplation du paysage politique pouvait être aussi fascinante que celle du paysage naturel, je m’étais plongé dans les archives récentes. Alors que le « Président Gaston » avait été balayé par les élections de 2004, et que les indépendantistes accédaient au pouvoir, la Polynésie française était un eldorado aux problèmes sociaux criants vivant sous perfusion, dans l’assistanat de l’Etat central lointain. En 2005, l’hebdomadaire britannique The Economist calculait que l’aide reçue par habitant du Pays s’avérait la plus élevée du monde, et que ce territoire était en fonction de sa démographie l’une des entités géographiques les plus riches de la planète. En deux siècles la population s’était presque métissée dans son ensemble. Davantage qu’entre les descendants du peuple originel et ceux des envahisseurs venus d’un peu partout, c’est entre les abandonnés et les privilégiés que s’ouvrait le gouffre. »

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