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Lectures
12 novembre 2021

Terra Alta

Terra-Alta

 

 

 

 

 

 

 

 

 

« Terra Alta »

CERCAS Javier

(Actes Sud)

 

Javier Cercas. Ecrivain espagnol que le Lecteur a fréquenté en trois ou quatre circonstances. Toujours intéressé, parfois même plus qu’intéressé (Les soldats de Salamine). Tant il est vrai que l’œuvre de Javier Cercas s’est jusqu’alors construite à partir de thèmes récurrents : la Guerre civile, le fascisme à la sauce ibérique, la fin du franquisme et la transition démocratique, la persistance si peu et si mal dissimulée des tares héritées de l’histoire.

Avec Terra Alta, Javier Cercas s’essaie a priori à un nouveau genre littéraire pour lui, le polar. A priori. Puisque le récit s’ouvre sur la description d’un crime d’une violence inouïe : la mise à mort, assortie de tortures, d’un couple de vieillards. Abomination perpétrée dans la luxueuse demeure de ces gens-là (et complétée par l’exécution de la domestique d’origine roumaine). Le tout dans une campagne perdue, comme ignorée, située dans le sud-ouest de la Catalogne, la Terra Alta.

L’enquête est confiée à la brigade policière de la commune voisine. Et, au sein de celle-ci, un des enquêteurs les plus déterminés et donc le plus actif, Melchor. Melchor, fils d’une prostituée récemment assassinée. Melchor qui a connu les geôles espagnoles, là où il s’est familiarisé à la lecture, là où il va découvrir et s’enthousiasmer pour Les Misérables, là où va naître sa vocation de flic, ébloui qu’il est alors par le personnage de Javert. L’enquête piétine. Melchor s’obstine, jusqu’à s’opposer à sa hiérarchie. Melchor joue au franc tireur. Melchor se confronte au pire, puisqu’il ne transige pas dans sa recherche de la vérité.

Le Lecteur ne fait que soulever ici d’infimes coins du voile opaque que Javier Cercas tisse ave autant de constance que de savoir-faire. Comme s’il était, et tout naturellement (instinctivement ?) un authentique auteur de polars. Sauf qu’il n’a rien oublié de ses thèmes de prédilection, et que ces thèmes-là s’en reviennent peu à peu conférer consistance au récit et donc, par ricochet, à l’enquête que Melchor finit par mener en solitaire. Un récit qui, bien entendu, aura tenu le Lecteur en haleine jusqu’à son terme.

« Javert l’éblouit. Ce que Melchor éprouvait pour cet individu marginal et marginalisé était bien plus complexe et plus subtil que tout ce qu’il avait éprouvé pour Jean Valjean. Javert était le méchant du roman, l’auteur l’avait créé pour que son antipathie rocailleuse, sa véhémence légaliste et son fanatisme parfois diabolique fassent naître le mépris chez le lecteur. Mais Melchor savait aussi que, peut-être malgré l’auteur, Javert avait un autre visage et il sentait que derrière sa défense entêtée des règles, derrière ses efforts inflexibles pour combattre le mal et imposer la justice, il y avait une générosité et une pureté diamantines, une volonté idéaliste, chevaleresque et sans faille de protéger tous ceux qui avaient pour seul recours la loi, une conscience héroïque du fait que quelqu’un devait sacrifier sa réputation et son bien-être personnel pour préserver le bien-être commun… »

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