Les pionniers

« Les Pionniers »

HAYCOX Ernest

(Actes Sud)

L’immersion dans ce qui constitua le temps fort de l’histoire des USA : la conquête de l’Ouest. La marche vers des contrées où des hommes et des femmes issus de l’immigration européenne vers ce qui pourrait devenir leur Eldorado. De futurs paysans qui ont tout à bâtir dans des territoires qui appartenaient avant leur irruption, si souvent brutale, à des tribus indiennes. Avec l’obligation de créer une société et d’inventer les règles du vivre ensemble.

Un roman dans lequel le vieux Lecteur a retrouvé bien de ces émotions qui jalonnèrent sa découverte en son âge d’adolescence d’une certaine littérature américaine, à commencer par London, Curwood, Cooper… Un formidable roman cinématographique, puisqu’il n’est pratiquement de phrases qui ne fasse naître des images sans aucun doute nées des westerns dont il fut en ses vertes années un fervent spectateur. La fantastique description de la traversée des rapides du fleuve, avec les chariots arrimés sur des radeaux de fortune, les troupeaux qui suivent tant bien que mal, et tous ces gens en souffrance, mais qui parviennent à tisser entre eux les liens de la solidarité. Des milliers de kilomètres parcourus depuis le Missouri, là où ils étaient partis, jusqu’à ces terres inconnues aux limites desquelles survivent quelques trappeurs d’origine française et des tribus indiennes que les nouveaux venus observent avec circonspection. La pluie. La neige. Le froid. La faim. Mais une volonté commune d’aller jusqu’au terme de l’aventure, avant que de se lancer dans l’édification d’une société au sein de laquelle les penseurs se nourriront de tout ou partie du rêve américain.

« Ils se rassemblèrent donc autour de son feu, mus par un besoin d’ordre qui les amenait à constituer ainsi un corps législatif tribal dont les délibérations revêtaient une importance croissante ; car chacun savait bien qu’il ne pouvait pas, seul, construire de routes ni de cabanes ni d’écoles, pas plus qu’il ne pouvait mourir de faim seul ; de la nécessité naissait la cohésion. »

Une tardive mais ô combien réjouissante découverte littéraire qui tranche avec les textes tricotés par les ravaudeurs officiels chargés de réécrire l’Histoire selon les exigences des vainqueurs.

(Le Lecteur à ignoré la postface libellée par Bertrand Tavernier. Non en raison qu’une quelconque méfiance. Mais parce qu’il tenait, au terme de sa découverte, à demeurer dans sa « bulle », à faire durer à ce qui fut assimilable à de l’émerveillement.)