Nous étions l'avenir

« Nous étions l’avenir »

NEEMAN Yaël

(Actes Sud)

Frustration du Lecteur. Qui attendait (espérait ?) plus que le récit d’une enfance et d’une adolescence dans un kibboutz. Tant il est vrai que ce qui se construisait en Israël durant son adolescence à lui laissait parfois entrevoir quelque chose qui ressemblait au socialisme. Un autre socialisme même s’il puisait du côté de Marx quelques-uns de ses fondements idéologiques. Ceux qu’évoquent l’Auteure lorsqu’elle évoque l’organisation de la vie des enfants au sein du kibboutz Yehi’am qui avait accueilli ses parents. « Séparer et protéger les enfants de la nature bourgeoise de la famille. On détruirait les fondements du vieux monde, et tel le phénix, un monde nouveau, juste et égalitaire, naîtrait de ses cendres. Telle était l’intention avouée, l’espoir d’un enfant nouveau, qui s’épanouirait en un homme nouveau. »

L’Auteure, on le comprend a grandi et fut éduquée dans un kibboutz « socialiste ». Eloignée de ses parents qu’elle ne voyait que quelques instants chaque jour. Partageant la vie d’un groupe d’enfants, garçons et filles, de son âge. Témoin des efforts accomplis par les adultes. Participant à un certain nombre de tâches collectives. Cheminant vers l’âge adulte sans jamais douter du bien fondé de ce qui lui était imposé. Ne découvrant l’autre monde qu’à l’âge adulte, le monde de l’apparente normalité.

La frustration du Lecteur est étrangère à ce récit (semblable à d’autres récits sur la vie dans les kibboutz). Elle résulte du peu de place consacré par l’Auteure au contexte dans lequel furent conduites ces réalisations. Dont celui de l’environnement géopolitique. Avec, et puisque Yaël Neeman naquit en 1960, les séquelles de la guerre qui « consacra » la naissance d’Israël. Avec les autres guerres qui opposèrent le jeune Etat à ses voisins arabes. Avec, et constamment sous-jacente, la question palestinienne. Ces « manques » relèguent le récit dans une juxtaposition, certes fort utile, des moments d’une jeune vie en construction. Qui offre tout de même l’avantage de montrer que voilà un demi-siècle, et en dépit d’un grand nombre de contradictions, des israéliens tentèrent d’inventer un devenir susceptible de susciter l’intérêt d’un jeune homme en quête d’utopies.