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Lectures
17 juillet 2013

Quand la lumière décline

ruge

« Quand la lumière décline »

RUGE Eugen

(Les Escales)

 

Redoutable épreuve pour le Lecteur que cette immersion dans l’histoire de l’Allemagne. Lui qui appartint à la famille bolchevique jusqu’au début des années 80 et qui fréquenta l’une et l’autre Allemagne d’alors. Rude épreuve car si les années écoulées exercèrent leur œuvre d’oubli (à défaut d’autre chose) subsistent de vagues et fluctuantes illusions sur ce qu’il advenait dans la partie orientale. Le roman d’Eugen Ruge l’emporta dans d’incessants allers et retours, accompagnant des personnages qui furent de manière délibérée des acteurs de la tentative de construction d’un communisme accolé à celui que les soviétiques érigèrent en modèle unique.  Des personnages du « vieux » communisme allemand fidèles jusqu’à l’aveuglement des préceptes édictés par Staline. Ceux-là mêmes dont leur fils fut la victime, lui qui fut interné dans l’Oural durant une dizaine d’années avant que de rencontrer puis d’épouser la résistante russe qui devint son épouse et qui l’accompagna en RDA lorsqu’il fut, non pas réhabilité, mais libéré du camp où il avait croupi. Les destinées des uns et des autres s’entrecroisent dans ce grand branle-bas de l’Histoire qui se fait. Tandis qu’émergent chez les nouvelles générations, celles de leurs enfants et petits-enfants d’autres attentes, d’autres exigences. Tandis qu’une nouvelle société émerge des ruines du communisme, copie conforme d’un autre modèle, hérité de la république fédérale allemande celui-là.

Eugen Ruge décrit avec une belle pertinence les rêves et les illusions de celui et de celle, les aïeux, qui vécurent les combats et les défaites des premiers communistes allemands, celui-ci et celle-là qui furent contraints à l’exil lorsque les nazis s’emparèrent du pouvoir. Un exil sur la côte Pacifique du Mexique, là où le petit-fils, atteint d’une forme virulente du cancer, s’essaiera si peu au tout début de ce nouveau siècle à retrouver les traces de leur passage. Ce nouveau siècle où le communisme n’est plus, au mieux, qu’un mauvais souvenir, au pire, un cauchemar. Le roman d’Eugen Ruge renvoie en pleine face du Lecteur ce que furent ses illusions à lui, y compris sur le communisme est-allemand. Mais ce roman-là n’est pas réductible à cette seule approche somme toute trop personnelle. Il est le roman du moment crépusculaire, lorsqu’un système atteint à son terme et qu’il n’est plus personne qui ait le désir de le voir survivre. Seuls les aïeux, englués dans leurs souvenirs, s’essaient encore de garder intacte l’image de leur geste prétendument héroïque. Voilà une œuvre d’une force prodigieuse vers laquelle, si le temps le lui est concédé, le Lecteur ne manquera pas de revenir.

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