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Lectures
7 novembre 2012

Le sermon sur la chute de Rome

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« Le sermon sur la chute de Rome »

FERRARI Jérôme

(Actes Sud)

 

« Ce qui naît dans la chair meurt dans la chair. Les mondes passent des ténèbres aux ténèbres, l’un après l’autre… » Ainsi parla Augustin. Dont le sermon sur la chute de Rome a donc inspiré Jérôme Ferrari. Lequel délivre ce superbe roman. Un roman dont le Lecteur peine à se défaire. Un roman vers lequel il revient, dont il s’imprègne. Non point tant parce que la Corse lui est familière et qu’il y est question de la Corse, cette terre singulière dont l’âpre beauté le fascine. Si le cadre choisi par Jérôme Ferrari est bien celui de cette terre-là, son propos vise à quelque chose qui atteint à l’universel. Un village se meurt. Deux jeunes hommes de là-bas font l’acquisition du vieux café. Ils le gèrent selon les modèles  dominants et l’établissement acquiert très vite ce qu’il est convenu d’appeler la notoriété. Touristes et autochtones s’y croisent. Dans cet environnement de l’intérieur, parmi ces montagnes où il est essentiellement question de survie. Au cœur du « village (où) les morts marchent seuls vers la tombe… ». Les évènements s’y déroulent de telle façon que le récit prend très vite les apparences d’une tragédie antique. Tragédie d’autant plus violente, d’autant plus sanglante qu’interfèrent les souvenirs des guerres coloniales auxquelles nombre de corses furent « associés » (le Lecteur reste impressionné lorsqu’il s’arrête devant les monuments aux morts des villages de Balagne et qu’il y lit la liste des noms de ceux qui périrent au Viêt Nam et en Algérie).

Alors oui, les mondes passent des ténèbres aux ténèbres, l’un après l’autre. Sans qu’il leur soit de rémission possible. Il n’est pas utile, pour Jérôme Ferrari, de rédiger une thèse sur saint Augustin. Il lui suffit de laisser entrevoir le fait qu’aucune civilisation n’a droit à l’éternité. Pas même celle qui s’est construite autour du bar d’un village de la montagne corse. Vision pessimiste ? Le Lecteur pense plutôt à la lucidité courageuse de l’écrivain. Un écrivain qui construit pierre à pierre une œuvre singulière, d’une force et d’une pertinence qui le réjouissent.

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