Honecker 21
"Honecker 21" de Jean-Yves CENDREY
(Actes Sud)
Ce doit être précisé d'emblée: le Lecteur se sent très proche du
Romancier. Et "Honecker 21" ne fait que renforcer cette proximité. Cendrey
n'aime pas ce que devient la société dans laquelle il vit. Il le proclame haut
et fort, dans un style tout plein de vigueur et de tonicité, agrémenté d'un
humour acerbe. De Berlin, où il a choisi de vivre. Avec ce personnage blafard,
cet Honecker qui n'est rien d'autre qu'un allemand ordinaire (et non l'autre, le
petit binoclard qui fut aux commandes de feue la RDA). Un personnage qui, avec
une certaine forme de jubilation, se résignera à se laisser broyer par la
machinerie dont il fut une composante active. Un personnage dont les cris de
souffrance se contiedront, puisque le monde d'aujourd'hui s'insupporte à
entendre ne serait-ce que leur écho.
"Elle (l'usine) est là, monumentale et fumante, reine faramineuse qui halète sous sa cuticule de poussière, et s'alimente et s'alimente, vide de longs wagons bleu canard que ses minuscules sujets poussent jusqu'à ses bouches et ses mandibules, et pond et pond des montagnes de sacs d'engrais blancs comme des oeufs, et dans l'effort lâche des vents qui vous importunent jusque loin dans les dédales des marais grouillants de pipelines aux allures d'anacondas."